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COMPETITION OFFICIELLE - Page 19

  • La compétition officielle du 61ème Festival de Cannes

    Voici la liste (temporaire) de la compétition officielle du 61ème Festival de Cannes dévoilée ce 23 Avril et qui comprend pour le moment 19 films. Quelques films sont en effet encore attendus par le festival et notamment un film français. La liste définitive devrait être dévoilée dans 3 jours. Bertrand Tavernier ou Bertrand Bonello ou Laurent Cantet pourraient y figurer.

    Ajout du 1er Mai: Les films en compétition sont finalement au nombre de 22 (voir précisions en bas de cet article).

    Comme chaque année on retrouve de nombreux habitués de la Croisette comme Steven Soderbergh qui avait reçu la palme d'or en 1989 pour "Sexe, mensonges et vidéo" et qui présente cette année un film sur le Che Guevara ("Che") interprété par Benicio del Toro (déjà un prétendant sans doute au prix d'interprétation).

    On retrouve également les frères Dardenne, deux fois lauréats de la palme d'or.

    Wim Wenders, Atom Egoyan, Nuri Bilge Ceylan sont également des habitués du Festival.

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    On ne note pour l'instant que deux films français (probablement rejoints bientôt par un troisième): le film d'Arnaud Desplechin "Un conte de noël" dont la sélection n'est une surprise pour personne, un sérieux prétendant donc. "La frontière de l'aube"  de Philippe Garrel (avec notamment Laura Smet et Louis Garrel) est le deuxième film français en compétition.

    Notons que Clint Eastwood a pu présenter son film à la toute dernière minute, une version par ailleurs encore inachevée de "Changeling" (L'échange) dans lequel joue notamment Angelina Jolie.

    Je détaillerai prochainement ces informations et cette compétition qui s'annonce en tout cas alléchante. Vous pourrez par ailleurs retrouver les critiques de ces films sur ce blog en direct de Cannes.

    Nuri Bilge CEYLAN ÜÇ MAYMUN ("Les Trois singes) 1h49

    Jean-Pierre et Luc DARDENNE LE SILENCE DE LORNA 1h46

    Arnaud DESPLECHIN UN CONTE DE NOËL 2h30

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    Clint EASTWOOD CHANGELING (L'Echange) 2h20

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    Atom EGOYAN ADORATION 1h40

    Ari FOLMAN WALTZ WITH BASHIR 1h27

    Philippe GARREL LA FRONTIÈRE DE L'AUBE 1h40

    Matteo GARRONE GOMORRA 2h15

    JIA Zhangke 24 CITY 1h47

    Charlie KAUFMAN SYNECDOCHE, NEW YORK 1er film 2h04

    Eric KHOO MY MAGIC 1h15

    Lucrecia MARTEL LA MUJER SIN CABEZA (La Femme sans tête) 1h27

    Brillante MENDOZA SERBIS 1h30

    Kornel MUNDRUCZO DELTA 1h32

    Walter SALLES, Daniela THOMAS LINHA DE PASSE 1h48

    Steven SODERBERGH CHE 4h00

    Paolo SORRENTINO IL DIVO 1h50

    Pablo TRAPERO LEONERA 1h50

    Wim WENDERS THE PALERMO SHOOTING 2H04

    Ajouts du 1er Mai, 3 films sont venus compléter cette liste:

    LAURENT CANTET Entre les murs

    JAMES GRAY Two lovers

    FERNANDO MEREILLES Blindness (Egalement film d'ouverture du Festival)

     

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  • Rattrapage: "La nuit nous appartient" de James Gray (compétition officielle 2007)

    Ce film, encore à l'affiche dans certaines salles, en compétition à Cannes en 2007, m'avait particulièrement marquée lors de sa projection officielle dans le Grand Théâtre Lumière. Je ne vous en avais alors écrit que quelques mots.  En voici la critique détaillée:

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    La nuit nous appartient. Voilà un titre très à-propos pour un film projeté en compétition officielle au  Festival de Cannes.  Cannes : là où les nuits semblent ne jamais vouloir finir, là où les nuits sont aussi belles et plus tonitruantes que les jours et là où les nuits  s’égarent, délicieusement ou douloureusement, dans une profusion de bruits assourdissants, de lumières éblouissantes, de rumeurs incessantes. Parmi ces rumeurs certaines devaient bien  concerner ce film de James Gray et lui attribuer virtuellement plusieurs récompenses qu’il aurait amplement méritées (scénario, interprétation, mise en scène...) au même titre que « My blueberry nights », mon grand favori, ou plutôt un autre de mes grands favoris du festival, l’un et l’autre sont pourtant repartis sans obtenir la moindre récompense…

    Ce titre poétique (« We own the night » en vo, ça sonne encore mieux en Anglais non ?)  a pourtant une source plus prosaïque qu’il ne le laisserait entendre puisque c’est la devise de l’unité criminelle de la police de New York chargée des crimes sur la voie publique. Ce n’est pas un hasard puisque, dans ce troisième film de James Gray ( « The Yards » son précèdent film avait déjà été projeté en compétition au Festival de Cannes 2000)  qui se déroule à New York, à la fin des années 80,  la police en est un personnage à part entière.  C’est le lien qui désunit puis réunit trois membres d’une même famille :  Bobby Green (Joaquin Phoenix), patron d’une boîte de nuit appartenant à des Russes, à qui la nuit appartient aussi, surtout,  et qui représentent pour lui une deuxième et vraie famille qui ignore tout de la première, celle du sang, celle de la police puisque son père Burt (Robert Duvall) et son frère Joseph (Mark Walhberg) en sont tous deux des membres respectés et même exemplaires. Seule sa petite amie Amada (Eva Mendes), une sud américaine d’une force fragile,  vulgaire et touchante, est au courant. Un trafic de drogue  oriente la police vers la boîte détenue par Bob, lequel va devoir faire un choix cornélien : sa famille d’adoption ou sa famille de sang, trahir la première  en les dénonçant et espionnant ou trahir la seconde en se taisant ou en consentant tacitement à leurs trafics. Mais lorsque son frère Joseph échappe de justesse à une tentative d’assassinat orchestrée par les Russes, le choix s’impose comme une évidence, une nécessité, la voie de la rédemption pour Bobby alors rongé par la culpabilité.

    Le film commence vraiment dans la boîte de nuit de Bobby, là où il est filmé comme un dieu, dominant et regardant l’assemblée en plongée, colorée, bruyante, gesticulante, là où il est un dieu, un dieu de la nuit. Un peu plus tard, il se rend à la remise de médaille à son père, au milieu de la police de New York, là où ce dernier et son frère sont des dieux à leur tour, là où il est méprisé,  considéré comme la honte de la famille, là où son frère en est la fierté, laquelle fierté se reflète dans le regard de leur père alors que Bobby n’y lit que du mépris à son égard. C’est avec cette même fierté que le « parrain » (les similitudes sont nombreuses avec le film éponyme ou en tout cas entre les deux mafias et notamment dans le rapport à la famille) de la mafia russe, son père d’adoption, regarde et s’adresse à Bobby. Le  décor est planté : celui d’un New York dichotomique, mais plongé dans la même nuit opaque et pluvieuse, qu’elle soit grisâtre ou colorée. Les bases de la tragédie grecque et shakespearienne, rien que ça, sont aussi plantées et même assumées voire revendiquées par le cinéaste, de même que son aspect mélodramatique (le seul bémol serait d’ailleurs les mots que les deux frères s’adressent lors de la dernière scène, là où des regards auraient pu suffire...)

    Les bons et les méchants.  L’ordre et le désordre. La loi et l’illégalité. C’est très manichéen  me direz-vous. Oui et non. Oui, parce que ce manichéisme participe de la structure du film et du plaisir du spectateur. Non, parce que Bobby va être écartelé,  va évoluer,  va passer de l’ombre à la lumière, ou plutôt d’un univers obscur où régnait la lumière à un univers normalement plus lumineux dominé par des couleurs sombres. Il va passer d’un univers où la nuit lui appartenait à un autre où il aura tout à prouver. Une nuit où la tension est constante, du début et la fin, une nuit où nous sommes entraînés, immergés dans cette noirceur à la fois terrifiante et sublime, oubliant à notre tour que la lumière reviendra un jour, encerclés par cette nuit insoluble et palpitante, guidés par le regard lunatique (fier puis désarçonné, puis déterminé puis dévasté de Joaquin Phoenix, magistral écorché vif, dont le jeu est d’ailleurs un élément essentiel de l’atmosphère claustrophobique du film). James Gray a signé là un film d’une intensité dramatique rare qui culmine lors d’une course poursuite d’anthologie, sous une pluie anxiogène  qui tombe impitoyablement, menace divine et symbolique d’un film qui raconte aussi l’histoire d’une faute et d’une rédemption et donc non dénué de références bibliques. La scène du laboratoire (que je vous laisse découvrir) où notre souffle est suspendu à la respiration haletante et au regard de Bob est aussi d’une intensité dramatique remarquable.

     « La nuit nous appartient », davantage qu’un film manichéen est donc un film poignant constitué de parallèles et de contrastes (entre les deux familles, entre l’austérité de la police et l’opulence des Russes,-le personnage d’Amada aussi écartelé est d’ailleurs une sorte d’être hybride, entre les deux univers, dont les formes voluptueuses rappellent l’un, dont la mélancolie rappelle l’autre- entre la scène du début et celle de la fin dont le contraste témoigne de la quête identitaire et de l’évolution, pour ne pas dire du changement radical mais intelligemment argumenté tout au long du film, de Bob) savamment dosés, même si la nuit brouille les repères, donne des reflets changeants aux attitudes et aux visages.  Un film noir sur lequel plane la fatalité :  fatalité du destin, femme fatale, ambiance pluvieuse. James Gray dissèque aussi les liens familiaux, plus forts que tout : la mort, la morale, le destin, la loi.

     Un film lyrique et parfois poétique, aussi : lorsque Eva Mendes déambule nonchalamment dans les brumes de fumées de cigarette dans un ralenti langoureux, on se dit que Wong Kar-Wai n’est pas si loin... même si ici les nuits ne sont pas couleur myrtille mais bleutées et grisâtres. La brume d’une des scènes finales rappellera d’ailleurs cette brume artificielle comme un écho à la fois ironique et tragique du destin.

     C’est épuisés que nous ressortons de cette tragédie, heureux de retrouver la lumière du jour, sublimée par cette plongée nocturne. « La nuit nous appartient » ne fait pas  partie de ces films que vous oubliez sitôt le générique de fin passé (comme celui que je viens de voir dont je tairai le nom) mais au contraire de ces films qui vous hantent, dont les lumières crépusculaires ne parviennent pas à être effacées par les lumières éblouissantes et incontestables, de la Croisette ou d’ailleurs…

    Pour une critique détaillée et approfondie de ce film, je vous recommande  également la lecture du blog « Boulevard du cinéma ».

    Sandra.M

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  • Compétition officielle: "Le scaphandre et le papillon", l'hymne à la vie et à l'art de Julian Schnabel

    En décembre 1995, un accident vasculaire brutal a plongé Jean-Dominique Bauby, rédacteur en chef du magazine  Elle et père de deux enfants, dans un coma profond. Quand il en sortit, toutes ses fonctions motrices étaient détériorées. Atteint de ce que la médecine appelle le «  locked-in syndrome » -littéralement : enfermé à l’intérieur de lui-même-, il ne pouvait plus parler, bouger, ni même respirer sans assistance. Dans ce corps inerte, seul un cil bouge. Ce cil devient son lien avec le monde, avec les autres, avec la vie. Il cligne une fois pour dire oui, deux fois pour dire non. Avec son cil, il arrête l’attention de son visiteur sur les lettres de l’alphabet qu’on lui dicte et forme des mots, des phrases, des pages entières… Avec son cil, il écrit ce livre, le Scaphandre et le papillon, dont chaque matin pendant des semaines il a mémorisé les phrases avant de les dicter…

    b31884d1b43472f6bcca206124b45095.jpgAvec un tel sujet, on pouvait redouter le pire : le pathos et le mélodrame outrancier, la performance ostentatoire et ridicule d’un acteur dans un rôle de composition-à-oscar-césar-prix d’interprétation. C’est donc avec quelques réticences que je suis allée à la projection de ce film présenté en compétition officielle. Devant le palais des festivals, la valse poétique et multicolore d’un lâcher de papillons gigantesques et somptueux a précédé la projection dans le grand Théâtre Lumière.

     Puis, l’obscurité, le générique…et nous nous retrouvons avec Jean-Dominique Bauby enserrés dans son scaphandre qu’est son corps inerte, puisque la première moitié du film est entièrement filmé en caméra subjective. Dès les premiers plans, nous épousons son regard flou et précis, incisif même, guidés par la voix off de Mathieu Amalric. Véritable métaphore du cinéma, son regard est sa fenêtre sur le monde, sa caméra. Immobile comme l’est le spectateur sur son fauteuil, il s’évade et papillonne par la mémoire et par l’imagination, de son corps et de l’hôpital maritime de Berck où il est soigné, comme le spectateur s’évade de la salle de cinéma par les images projetées sur l’écran. L’identification est donc immédiate, d’autant plus qu’il porte un regard lucide et non moins ironique sur sa situation, sans jamais s’apitoyer sur son sort.

    Auparavant aveugle et sourd à la beauté du monde, il n’a jamais aussi bien vu que d’un seul œil. Vu et ressenti. C’est en effet un film sens-uel et sens-ationnel : tout ce que Jean-Dominique Bauby  ne peut saisir, son regard s’en empare avec gourmandise, rattrapant au vol les moments de bonheur qu’il a auparavant laissés s’envoler. Ce film nous saisit, nous enlace, nous enserre, délicieux enserrement celui-là, nous arrache à sa réalité et à la nôtre, celle de spectateur, pour ne plus nous lâcher. Enserrés nous aussi, dans son regard virevoltant, qui nous fait éprouver et savourer la liberté comme rarement un film y est parvenu. Par ce qu’il voit : le vent qui s’engouffre dans une chevelure, ou par son regard qui glisse sur une peau nue qui se laisse entrevoir. Par ce dont il se souvient : son dernier voyage, en décapotable, et le frémissement des arbres au-dessus de sa tête. Par le souvenir de ses gestes précipités mais précis, lorsqu’il rasait son père, lui aussi prisonnier, alors qu’il était encore libre d’agir, alors qu’il (en) était inconscient, si pressé, trop pressé.  Par ce qu’il imagine surtout, il s’évade de son scaphandre par la puissance de son imagination débridée : il peut alors tout vivre comme même faire un dîner pantagruélique avec la jeune femme qui prend son livre en notes (Anne Consigny, décidément remarquable, à noter qu’elle retrouve ici son partenaire de Je ne suis pas là pour être aimé, Patrick Chesnais, également remarquable en médecin cassant qui suscite des répliques cinglantes de Jean-Dominique Bauby) à laquelle il n’est pas insensible, il peut aussi voir des glaciers s’effondrer puis se reconstruire. Son monde s’effondrer et le reconstruire. Parce que si son corps n’existe plus, par la pensée, il est tour à tour : séduisant, en colère, ironique voire cynique, cruel parfois mais en tout cas VIVANT. Si le scaphandre l’empêche de se mouvoir, le papillon peut l’emmener partout, là où même il n’osait aller quand il était « aveugle et sourd », avant.

    Le scaphandre et le papillon est un vibrant hymne à la vie, à la liberté, à la création surtout. L’art devient pour lui libérateur et même salvateur. Hommage à l’art, à tous les arts : à la peinture (Julian Schnabel est peintre), à l’écriture, au cinéma, à la musique aussi. Les lettres épelées mélodieusement par les différents visiteurs ne sont jamais lassantes et constituent autant de partitions différentes qui nous tiennent en haleine. Le spectateur est alors suspendu aux lèvres de celui ou celle qui parle et qui chante les lettres, à la voix vibrante de vie de Mathieu Amalric.

    A la place d’un livre sur la vengeance au féminin, une sorte de Monte-Christo au féminin qu’il projetait d’écrire avant son accident, Jean-Dominique Bauby va donc écrire sa vie. Celle d’une mort, d’un corps emprisonné à jamais. D’une renaissance aussi, celle de son esprit, si libre et alerte. Sans aucun sentiment de revanche et de vengeance. Seulement contre son orgueil et son aveuglément peut-être.

    Marie-Josée Croze, Anne Consigny, Emmanuelle Seigner toutes formidablement dirigées sont autant de preuves de  l’existence de cet esprit qui ne cesse pas de penser et séduire.  Malgré tout. A cause de cela justement.

    Julian Schnabel parvient à signer un film résolument optimiste sur une histoire tragique. Tout juste peut-on regretter deux plans trop appuyés, l’un sur son père en larmes, et un dernier plan trop appuyé sur son infirmité physique… ce bouleversant tourbillon de vie emporte néanmoins ces deux plans regrettables sur son passage dévastateur et bouleversant.

    Le scaphandre et le papillon est une déclaration d’amour poignante et ironique, lucide et poétique. A la vie. A l’art. A la mer dont parfois on oublie de savourer la beauté de ses changeants reflets d’argent. Une œuvre d’arts.

    Quelques jours après cette projection, je  retrouvais encore des papillons égarés, affolés, éblouis par les lumières impitoyablement et imperturbablement aveuglantes, agglutinés aux vitrines de la Croisette. La frontière est décidément si fragile entre le sublime et la laideur, entre un papillon et un scaphandre... Ce film nous le rappelle magnifiquement, justifiant ainsi amplement son prix de la mise en scène de ce 60ème Festival de Cannes.

     Sandra.M

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  • Compétition officielle (suite): "Souffle" de Kim Ki-Duk

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    Yeon, une jeune femme qui vient juste de découvrir l’infidélité de son mari rend régulièrement visite à un condamné à mort  qui effectue fréquemment des tentatives de suicide en prison.  Elle ne le connaît pas. Elle se fait passer pour sa petite amie. Ils tombent amoureux l’un de l’autre… et leurs rencontres deviennent de plus en plus passionnées sous le regard du directeur de la prison, qui épie plus qu’il ne surveille, derrière son écran de surveillance, sorte de double de Kim Ki-Duk qui décide quand la rencontre, et donc le film auquel lui assiste, doit s’interrompre, en appuyant sur un bouton vengeur.

     La jalousie. Le pardon. L’espoir. La passion. Et autant de souffles qui libèrent. Ou qui emprisonnent.

    Après avoir présenté « L’Arc » dans la section Un Certain Regard, en 2005, c’est en compétition officielle que revient cette année le prolifique Kim Ki-Duk. Après la langueur mélancolique et poétique de Locataires et de Printemps, été, automne, hiver et printemps, nous  attendions légitimement beaucoup de souffle de ce film éponyme. S’il ne nous envoûte pas autant que les films précités, il nous déroute néanmoins et nous emmène avec lui dans cette passion absolue, dans cet univers plus âpre aussi dont la fantaisie n’est pas absente. Respiration nécessaire, aux frontières du burlesque.

    ba3c4cb6a5ce936bf4d6080dfda638b8.jpgLe souffle, c’est ce qu’ils cherchent désespérément l’un et l’autre. Ils étouffent, agonisent, se noient chacun à leur manière. Le souffle, c’est ce qui leur manque pour extérioriser leurs douleurs indicibles et suffocantes. Enfermés dans une souffrance si différente et similaire. Enfermés dans la même incommunicabilité. Le souffle, c’est la respiration qu’ils vont réapprendre ensemble. Même si elle est vaine et éphémère. Forcément éphémère, après tout. Elle a décidé de tomber amoureuse, sans raison, ou si : survivre, retrouver un souffle de vie. Tomber amoureuse de lui, sans raison, ou si: ils se ressemblent finalement.  Il a tué, peut-être sans raison. Il accepte son amour déraisonnable, irraisonné, forcément aussi, sans raison aussi ou si : elle lui insuffle un peu de vie et d’évasion. Même illusoires. De la vie et de l’évasion quand même. Les invraisemblances, les ellipses et les zones d’ombre de ce film qui n’en est pas avare nous importent peu. Kim Ki-Duk a le don de nous donner envie de croire à l’improbable. Magie du cinéma, encore, même derrière les barreaux d’une prison.

    Kim Ki-Duk nous entraîne dans son univers, dans ses quatre saisons  (oui, encore…), avec ses personnages à fleur de peau. Un film douloureux non dénué de légèreté qui nous fait passer de la suffocation au rire salvateur avec maladresse, parfois.

    Chang Chen qui interprète le condamné à mort rend ce personnage quasiment muet particulièrement expressif et nous fait suivre sa tragique trajectoire avec intérêt. Jusqu’à son dernier souffle.

    S’il explore ses thèmes habituels : la violence (de celle qui brise les anges, de celui qui brise les vies), la sexualité, les saisons, Kim Ki-Duk réussit encore malgré tout à nous surprendre… Vivement le suivant !                                                                     

    Sortie en France : le 21 novembre 2007

    Voir ma critique de « Locataires » de Kim Ki-Duk

    A suivre sur « In the mood for Cannes » : la critique du « Scaphandre et le papillon »  de Julian Schnabel, la critique de « Chacun son cinéma » etc.

    Sandra.M

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  • Christophe Honoré « enchante » le Grand Théâtre Lumière avec ses « chansons d’amour »

    medium_chansons_d_amour.JPGL’évènement de ce vendredi 18 Mai fut d’abord la projection du premier film français en compétition officielle : « Les chansons d’amour » de Christophe Honoré. Si ce titre vous faisait  espérer un mélodrame sirupeux avec des chansons vociférant des "je t’aime, moi non plus, encore et toujours, plus du tout,  à la folie", passez votre chemin. D’amour il est pourtant question. D’amours même.

     

    Pitch : Dans le 10ème arrondissement de Paris Ismael, (Louis Garel) secrétaire de rédaction d’un journal quotidien, travaille la nuit. Autour de lui gravitent ses deux petites amies, Julie (Ludivine Sagnier) et Alice (Clotilde Hesme)  ses sœurs, ses parents. Suite à un tragique évènement l’insouciance va laisser la place à la gravité…

     

    Dans Paris, encore et plus que jamais. Pas un Paris sublimé mais un Paris que Christophe Honoré filme magnifiquement, à nouveau, cette fois de la Porte Saint-Martin à la Bastille. Une vraie déclaration d’amour à la capitale, véritable personnage, dès les premiers plans du film. Une déclaration en trois temps : « Le départ », « L’absence », « Le retour »…et par ce biais, un hommage à Jacques Demy déjà, et aux Parapluies de Cherbourg (grand prix du festival de Cannes en 1964…). Romain Duris chantait d’ailleurs déjà « La chanson de Lola » dans 17 fois Cécile Cassard. 

     

     La référence à la Nouvelle Vague est moins ouvertement affichée que dans « Dans Paris » mais néanmoins très présente notamment pas un temps de tournage relativement bref,  le ton et le jeu parfois distanciés des acteurs, les nombreuses références littéraires etc. 

     

    La comédie musicale est un genre qui se raréfie et y avoir eu recours constitue une autre originalité de ce film, très différent de « On connaît la chanson », « 8 femmes » et « Jeanne et le garçon formidable », les comédies musicales les plus récentes. Les personnages ne dansent pas, les chansons ne sont pas non plus un simple concept mais elles font avancer le récit et alors que bien souvent elles créent une distance avec l’émotion, elles la suscitent plutôt ici. Les chansons sont ici celles d’Alex Beaupain, entre gravité et ironie, teintées d’influence de pop anglaise.

     

    « Les chansons d’amour » est un véritable film en trompe l’œil. Faussement mélodramatique. Avec des personnages faussement insouciants. Il traite habilement d’un sujet tragique ( de nouveau le deuil) avec légèreté, la forme épousant le fond et la fausse insouciance d’Ismael face au drame et à l’impensable.

     

    Les chansons d’amour est un film qui en agacera certains qui le trouveront parisianiste et manièré, il charmera ceux qui acceptent de se laisser embarquer par ces chansons d’amour d’une gravité lègère, et par ses acteurs empreints de la grâce de leurs personnages avec leurs touchantes fêlures au-dessus desquelles plane  l’ombre fontomatique de la disparition , des spectateurs embarqués...dont je suis.

     

    Des prix ? Louis Garel est exceptionnel en jeune homme qui, par ses nouvelles expériences amoureuses, va essayer de faire face (faire bonne ou mauvaise figure, aussi, c'est selon)  au chagrin. Pourquoi pas un prix d’interprétation ? A souligner le talent de Chiara Mastroianni dont chaque apparition dans ce film contribue à créer une vraie émotion, néanmoins un rôle trop secondaire et effacé pour prétendre à un quelconque prix. Pourquoi pas un prix de la mise en scène ? Du scénario ? Une présence au palmarès n’est en tout cas pas à écarter, et serait mérité ! A suivre à la lueur des  prochains films en compétition. Après la palme d'or et le prix d'interprétation féminine reçus par "Dancer in the dark" en 2000, la comédie musicale serait-elle de nouveau à l'honneur en 2007?

    medium_verges.JPGA suivre sur ce blog :La critique de « L’avocat de la terreur », vu hier dans la section « Un certain Regard », le passionnant et édifiant documentaire de Barbet Schroeder qui, à travers le portrait  de Jacques Vergès, retrace l’histoire du terrorisme depuis la guerre d’Algérie. A suivre également la critique de « The Banishment » le très beau film de Andrei Zvyagintsev, vu hier soir au grand théâtre Lumière. Et enfin le film de Kim Ki Duk, projeté en compétition officielle que je verrai cet après-midi !

    Sandra.M

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  • In the mood for "My blueberry nights" et "Zodiac"

    medium_cn5.JPGQuelques mots. Trop brefs pour raconter ces deux premiers jours déjà bien chargés mais le temps se fait rare et précieux, le festivalier véritable drogué du et au septième art ne sachant résister à cette offre cinématographique gargantuesque, à cette frénésie contagieuse et agréablement étourdissante. Un temps qui s’effrite à la vitesse de la Lumière, celle, magique et éblouissante, des frères du même nom. Cela tombe bien : le temps c’est justement un des sujets favoris du cinéaste qui a l’honneur d’être en ouverture de cette 60ème édition (il faut l’avouer après une cérémonie d’ouverture bien morose, mais les véritables festivités, paraît-il, auront lieu dimanche, pour la soirée célébrant les 60 ans du festival). Et quel étourdissement lorsqu’il est provoqué par un tango coloré, celui des images de Wong Kar Wai, (qui, pour une fois a coécrit le scénario) qui ouvre le bal avec « My blueberry nights » film d’ouverture figurant  exceptionnellement aussi en compétition officielle, le film d’ouverture étant plutôt habituellement un blockbuster américain présenté en avant-première et hors compétition comme le tristement mémorable et involontairement comique « Da vinci Code », l’an passé.

    Parce qu’il danse avec nous, donc, Wong Kar Waï. Langoureusement. Sa caméra nous emporte dans son ailleurs où les nuits sont poétiquement bleu myrtille, où les ralentis suspendent notre souffle un trop court et jubilatoire instant.

    medium_blueberry.JPGPitch : « Après une séparation douloureuse, Elizabeth (Norah Jones) se lance dans un périple à travers l’Amérique, laissant derrière elle une vie de souvenirs, un rêve et un nouvel ami - un émouvant patron de bar, Jeremy (Jude Law) - tout en cherchant de quoi panser son coeur brisé. Occupant sur sa route des emplois de serveuse, Elizabeth se lie d’amitié avec des clients dont les désirs sont plus grands que les siens : un policier tourmenté et sa femme qui l’a quitté, une joueuse dans la déveine qui a une affaire à régler. A travers ces destins individuels, Elizabeth assiste au spectacle du véritable abîme de la solitude et du vide, et commence à comprendre que son propre voyage est le commencement d’une plus profonde exploration d’elle-même. »

     Pour son premier film en langue anglaise, Wong Kar Waï a réalisé un road movie mélancolique, un voyage initiatique qui nous emmène de New York au Nevada, et sur la célèbre route 66. Les kilomètres et le temps qui séparent les deux protagonistes les rapprochent, d’eux-mêmes, puis l’un de l’autre, aussi par les mots qu’ils s’envoient comme des bouteilles à la mer.

     Comme ses précédents films, « My blueberry nights » est un poème envoûtant, une peinture captivante dans laquelle on se retrouve immergés, fascinés, hypnotisés, transportés dans un univers sombre et lumineux traversé par une galerie de portraits de personnages touchants fracassés par l’existence. Le temps n’existe plus ou plutôt s’y substitue celui recréé par Wong Kar Waï, véritable démiurge d’un univers qui nous enrobe, nous enveloppe, nous ensorcelle insidieusement. Lorsque nous sommes dans un univers où les nuits sont bleu myrtille, tout est possible même que le temps suspende son vol. Wong Kar Waï, mieux que quiconque, y exprime tout ce que recèle l’expression « la magie du cinéma ». La magie d’un voyage vers l’espérance, la magie de ces images qui nous entraînent dans leur danse sensuelle, qui nous font croire que la vie peut marcher au ralenti, qu’un voyage peut nous redonner le sourire comme ce film dont on ressort avec une sensation d’apaisement, comme après un voyage qui nous aurait procuré des émotions indicibles. Des nuits bleu myrtilles à savourer sans modération même (et parce que) nous y retrouvons ce qui caractérise le cinéma de Wong Kar Wai : les ralentis langoureux donc, une bande originale particulièrement réussie (me trompé-je ou la musique –notamment celle qui précède le générique- ressemble à s’y méprendre à celle d’In the mood for love ?), une photographie sublime aux teintes bleutées et rougeoyantes, des gros plans sur les visages  (parfois il nous semble voir Maggie Cheung à tel point la caméra de Wong Kar Wai étreint ses actrices de la même façon que dans « In the mood for love »).

    Des prix pour « My blueberry nights » ? La prestation tout en retenue de Norah Jones pourrait mériter un prix d’interprétation, ce qui est peu probable,  le jury préférant généralement le vrais rôles de composition. La mise en scène de Wong Kar Waï, est  évidemment remarquable, mais un prix dans cette catégorie est néanmoins aussi peu probable Wong Kar Waï l’ayant déjà reçu en 1997 et ne bénéficiant plus de l’effet de surprise pour un style et un univers désormais connus.

    A noter : -Wong Kar Waï sera de nouveau à l’honneur dimanche soir puisqu’il figure parmi les réalisateurs ayant réalisé un des courts métrages du film du 60ème.

    -Vous pouvez également retrouver ma critique de « In the mood for love » sur ce blog.

    medium_cn2.JPGTout autre style avec le second film de la compétition : « Zodiac » de l’américain David Fincher, ma première projection de 19H au Grand Théâtre Lumière pour cette édition 2007.

    Pitch : « L'histoire vraie de l'énigmatique serial killer qui terrorisa San Francisco à la fin des années soixante. Prenant un malin plaisir à annoncer ou commenter ses macabres exploits dans des messages codés, l'insaisissable Zodiac continua à défier la police et le FBI durant plusieurs décennies. La traque de ce tueur hors normes devint une tragique obsession pour deux journalistes et quatre policiers, qui lui sacrifièrent leur vie privée, leur santé et leur avenir. On ne connaîtra sans doute jamais le nombre exact des victimes de ce Jack l'Éventreur américain, qui varie selon ses propres estimations de 13 à 40. Une chose est sûre : les survivants font partie du lot, car Zodiac les marqua à jamais... »

    « Zodiac » a réussi l’exploit de recevoir...un des accueils les plus froids délivré à un film en compétition officielle lors de sa projection officielle, en l’occurrence hier soir à 19H. A peine quelques timides applaudissements. L’indifférence, pire que tout, que les sifflets même, signe à Cannes de controverse, de passion donc. L’équipe du film, David Fincher en tête est repartie, visiblement déçue, voire blessée par cet accueil. Cannes l’impitoyable. Etait-ce mérité ? 

    medium_zodiac.2.JPGLa mise en scène est certes réussie mais demeure, à l’image de l’ensemble de ce film, particulièrement classique. Nous ne voyons pas le temps passer, fait notable pour un film de 2H36, en grande partie grâce au rôle et la prestation de Jake Gyllenhaal, personnage le plus intéressant, voire fascinant, celui d’un caricaturiste qui consacre sa vie et son temps à reprendre l’enquête, aux frontières de la folie, une quête obsessionnelle au détriment de ceux qui l’entourent. Un film dont on se demande les raisons de sa sélection : une adaptation (celle de deux romans de Robert Graysmith, le caricaturiste), une mise en scène classique, une histoire vraie, tout cela n’annonçant pas une originalité remarquable. Probablement le nom du réalisateur y est-il pour beaucoup…malheureusement ce « Zodiac » n’est pas à la hauteur de ses précédents films.

     

    Un film  réaliste sur une quête obsessionnelle (celle de tous ceux qui menèrent cette enquête), qui ne laisse néanmoins pas l’ennui s’installer, brillamment interprété mais certainement trop classique et dénué d’originalité (une caractéristique probablement aussi liée au désir du réalisateur de recourir à une réalisation sobre plutôt qu’à une démonstration ostentatoire de virtuosité, comme cela lui fut parfois reproché par le passé) pour figurer en compétition officielle. Reste que la comparaison avec Hitchcock entendue ici ou là serait une insulte pour le maître du suspense, l’intérêt et la réussite de ce film n’étant nullement là , plutôt dans un scénario assez bien mené (qui révèle néanmoins ses lacunes au dénouement car après 2H37 de film  il se termine par un laïus interminable pour nous expliquer le devenir des protagonistes ) mais dans celle du personnage particulièrement bien joué et « dessiné » du caricaturiste dont les livres ont inspiré ce film.

     Des prix ? Jake Gyllenhaal mériterait un prix d’interprétation, néanmoins bien difficile à prédire après seulement une journée de compétition. Pourquoi pas un prix pour le scénario ? A suivre. J’y reviendrai.

    Aujourd’hui à mon programme : « Les chansons d’amour » de Christophe Honoré et « L’avocat de la terreur » de Barbet Schroeder.

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    Photo-Sandra.M: La montée des marches de "Zodiac" vue du palais des festivals.

     Toutes mes excuses aux lecteurs « in the mood » pour cet article retardataire et un peu expéditif, et pour les éventuelles répétitions n’ayant pas le temps de relire. (Ah, la rude existence surchargée du festivalier…)Bientôt de nouveaux articles sur la compétition officielle et sur tout ce qui se passe sur la Croisette. Je dois m’arrêter là, le grand Théâtre Lumière m’attend… 

    Sandra.M

    Catégories : COMPETITION OFFICIELLE Lien permanent 5 commentaires Pin it! Imprimer