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catherine deneuve

  • Festival de Cannes 2015 : bilan complet du festival et palmarès complet commenté

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    35 films vus, parfois grands, souvent bouleversants. 10 conférences de presse, certaines mémorables. Des dîners de grands chefs. Des soirées dans des décors fastueux souvent d’ailleurs écourtées pour ne manquer sous aucun prétexte la séance presse de 8H30, délectable rituel matinal. De belles rencontres professionnelles. 15 jours trépidants et exaltants sur la Croisette à « voir trois films par jour, dormir 2h par nuit » comme l’a dit en connaisseur Lambert Wilson lors de la clôture, 15 jours sous un soleil irréel comme si un mystérieux metteur en scène avait voulu souligner, par cette météo improbable, le sentiment d’ailleurs, l’atmosphère enivrante, à nous faire oublier que cela ne durerait pas toujours, à nous étourdir de bonheur cinématographique comme le ballet de Benjamin Millepied lors de l’ouverture, à nous faire oublier que cette réalité vers laquelle chacun des films nous ramenait pourtant et de laquelle le festival nous tenait si éloignés finirait par reprendre ses droits, à en oublier que le temps continuait à s’écouler, que tout, un jour, a une fin, y compris le Festival de Cannes.

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    De fin, d’écoulement inexorable et assassin du temps, de mort (« Chronic »), de deuil souvent impossible-pléonasme, non ?- du père, de la mère, de l’enfant, de l’amour ou du passé (« Louder than bombs », « Notre petite sœur », « Valley of love », « Mia madre », « Mon roi », « Youth ») de douleur indicible (l’incapacité à dire la souffrance serait peut-être la thématique commune de ces films du monde entier alors que, pourtant, partout, jamais nous n’avons eu autant de moyens de communiquer), c’est ce dont nous ont d’ailleurs beaucoup parlé les films en compétition de ce 68ème festival, des meurtrissures qu’un monde égoïste condamne au silence face auxquelles l’amour, le foyer, la croyance semblent être les derniers recours.

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    Si Cannes est le reflet du monde, alors il le révèle meurtri par des douleurs contenues face à la violence sociale et politique, un monde hanté par la mort, par l’absence, par une douleur ineffable dans une société souvent bavarde et sourde. L’amour (le jury a couronné deux femmes amoureuses), étouffant (« Mon roi ») ou étouffé (« Carol »), les émotions, les souvenirs, la famille (souvent celle qu’on s’est construite : « Notre petite sœur », « Dheepan ») et l’art (« Youth ») et donc le cinéma et son mystère et son miracle (« Mia madre », « Valley of love ») subsistent alors comme seuls recours contre le temps (« Youth »), ennemi éternel et invincible, contre la loi du marché (dans le film éponyme), contre l’égoïsme (« The Lobster », « Mountains may depart »), qui dévorent les êtres. C’est peut-être une phrase extraite du film de clôture, « La glace et le ciel » qui nous apportait une réponse et un espoir face à tout cela : « Je crois que l’homme n’est jamais aussi sublimement lui-même que face à l’adversité. »

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     Finalement, de ce tourbillon grisant de cinéma, « il n’y a que les émotions qui restent », pour paraphraser une réplique d’un formidable film oublié du palmarès, « Youth »de Paolo Sorrentino qui, justement, nous parlait du temps qui passe. Inexorablement.   Alors, c’est de ces émotions persistantes, indélébiles, marquantes que je vais vous parler aujourd’hui, en guise de bilan, et avant de revenir plus longuement au cours de l’année à venir, sur les films vus pendant ce 68ème Festival de Cannes :

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    moretti

     -la tristesse qui m’a ravagée au dénouement de « Mia madre » de  Nanni Moretti, ce vertige effroyable du lendemain suggéré par un regard et une réplique dévastateurs (: «– A quoi tu penses ? – A demain !» ) , un absent du palmarès (qui s’est consolé avec le prix du jury œcuménique ) qui a pourtant bouleversé les festivaliers et qui a souvent été cité comme potentielle palme d’or que Nanni Moretti avait déjà reçue en 2001 pour un film qui, déjà, portait sur le thème du deuil, « La chambre du fils ». Dans « Mia madre », Margherita est une réalisatrice confrontée à la fois à un tournage avec un acteur insupportable (irrésistible John Torturro) et à la mort annoncée de sa mère. Toute l’intelligence de Moretti réside dans l’alternance entre le burlesque et le mélodrame, la légèreté de la comédie atténuant la gravité du drame. L’illusion de légèreté du cinéma (le film de Moretti – qui lui-même avait été confronté à la mort de sa mère lors du tournage de « Habemus Papam »- mais aussi le film que tourne Margherita dans le film de Moretti, judicieuse mise en abyme) pour tenter d’affronter le gouffre étourdissant de la mort et du lendemain après la perte forcément insensée d’un parent. Il met ainsi l’accent sur tout ce qui permet d’immortaliser la vie et le temps qui s’enfuient, notamment par un mélange des degrés de narration : les souvenirs, les livres, les rêves et évidemment le cinéma. Un film pudique, profondément émouvant et un regard final qui vous hante longtemps après la projection et qui me hante et bouleverse encore.

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    - la jubilation devant « The lobster » de Yorgos Lanthimos (qui avait obtenu le prix Un Certain Regard en 2009 pour « Canines ») qui se déroule dans un futur proche dans lequel toute personne célibataire est arrêtée, transférée à l’hôtel et a 45 jours pour trouver l’âme sœur. Passé ce délai, elle sera transformée en l’animal de son choix. Un film déroutant, cinglant, burlesque, métaphorique, inventif, dans lequel l’homme est un loup pour l’homme (littéralement), profondément égoïste et dont la fin n’est pas décevante comme l’ont déploré certains commentateurs mais au contraire illustre brillamment ce propos. Le couple devient un totalitarisme condamnant le solitaire à l’animalité. Un film intelligemment singulier qui regorge de trouvailles insolites, certes sous l’influence de Buñuel (« Un chien andalou »), mais qui ne ressemble à aucun autre…

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    -le bonheur d’entendre les spectateurs du Grand Théâtre Lumière rire éperdument devant les images des frères Lumière… 120 ans plus tard. A l’occasion des 120 ans du Cinématographe, leurs films restaurés ont en effet été projetés aux festivaliers, le tout avec les commentaires cinéphiliques et inénarrables de Thierry Frémaux, avec la traduction (qui l’était tout autant) de Bertrand Tavernier. C’est le 28 décembre 1895 qu’eut ainsi lieu la première séance de cinéma payante au Grand Café à Paris. C’est un film de 93 minutes qui nous a été projeté, en réalité un montage de 114 films restaurés réalisés par Louis Lumière et ses opérateurs entre 1895 et 1905, de la « Sortie de l’usine Lumière« , « L’Arroseur arrosé » (la première fiction de l’Histoire cinéma) à des films aussi méconnus qu’étonnants, cocasses, maîtrisés avec, déjà, les prémisses du langage cinématographique, du gros plan au travelling, un véritable voyage qui nous a emmenés dans les origines du cinéma mais aussi sur d’autres continents et qui a suscité l’hilarité générale mais aussi l’admiration devant des films d’une qualité exceptionnelle dont chacun démontrait à quel point déjà les Lumière pratiquait et maîtrisait l’art de la mise en scène et qu’il s’agissait bien là de fictions et non de simples documentaires. Une projection que je ne souhaitais manquer sous aucun prétexte, et à laquelle je suis arrivée in extremis, montant les marches la dernière, après des péripéties dignes du plus burlesque des films Lumière mais c’est là une autre histoire…en tout cas, je ne le regrette pas car ce fut un moment de rare exultation cinéphilique, le tout en présence de nombreux « frères du cinéma » comme l’a souligné Thierry Frémaux : Taviani, Coen, Dardenne mais aussi en présence de Claude Lanzmann et Claude Lelouch parmi un prestigieux parterre d’invités.

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    - Une relative déception en découvrant le film ( et surtout son dénouement) qui a obtenu la palme d’or, « Dheepan » de Jacques Audiard «l’histoire de trois étrangers qui, dans des circonstances difficiles, vont tenter de former une famille» comme l’a résumé Guillermo del Toro lors de la conférence de presse du jury, pour justifier ce choix d’un jury qui s’est dit « unanimement enthousiaste », mais qui est aussi ce qu’est finalement toute palme d’or telle que l’a définie Cécile de France (qui en était la remettante) lors de la clôture : « Un reflet du monde, le cœur du cinéma qui bat, intense et régulier », néanmoins de cette histoire de trois Sri-Lankais qui fuient leur pays, la guerre civile, et qui se retrouvent confrontés à une autre forme de guerre dans la banlieue française où ils échouent, douloureuse réminiscence pour « le père de famille », Dheepan, Audiard, plus qu’un film politique a voulu avant tout faire une histoire d’amour. Dans ce nouveau long-métrage qui flirte avec le film de genre, Audiard explore un nouveau territoire mais toujours porte un regard bienveillant, et plein d’espoir sur ses personnages interprétés par trois inconnus qui apportent toute la force à ce film inattendu (dans son traitement et au palmarès). « Je remercie Michael Haneke de ne pas avoir tourné cette année » a ainsi déclaré Jacques Audiard en recevant son prix. Michael Haneke avait en effet reçu la palme d’or en 2009 pour « Le ruban blanc », alors que Jacques Audiard avait obtenu le grand prix pour l’inoubliable « Un Prophète ».

    -l’émotion procurée par des musiques qui me trottent encore dans la tête : « Famous Blue Raincoat » de Leonard Cohen dans « Mia madre », « Encore un matin » de Jean-Jacques Goldman dans « La loi du marché », « Go West » des Pet Shop Boys  dans «  Mountains May depart » de Jia Zhang-ke qui revient à plusieurs reprises dans le film mais aussi les voix envoûtantes de Benjamin Clementine et John C.Reilly lors de la clôture.

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     -la déception de voir justement oublié du palmarès le mélancolique, lyrique, terriblement visionnaire « Mountains may depart » de Jia Zhang Ke, qui raconte, sur un quart de siècle et en trois périodes distinctes, entre une Chine en profonde mutation et l’Australie, les espoirs, amours, désillusions de personnages face à leurs destins. A nouveau, Jia Zhang Ke met en scène les mutations de la Chine (revoyez le splendide « Still life »). Une vision sans concessions qui métaphorise une Chine qui se laisse éblouir par les sirènes du capitalisme et de l’individualisme (le fils d’un des personnages sera ainsi baptisé… Dollar). Peut-être finalement le film le plus moderne de cette sélection, terriblement clairvoyant et poignant avec une utilisation du cadre et du son remarquables. Même déception pour « Notre petite sœur » de Kore-Eda, mon premier coup de cœur du festival qui raconte l’histoire de trois sœurs qui se rendent à l’enterrement de leur père qui les avait abandonnées une quinzaine d’années auparavant et qui à cette occasion font la connaissance de leur demi-sœur qu’elles décident d’accueillir dans leur grande maison familiale, un film lumineux qui évoque avec beaucoup de délicatesse, l’indicible douleur de l’absence et des douleurs enfouies. Cette adaptation d’un roman graphique aurait mérité une plus longue ovation que celle, fugace, reçue lors de sa projection officielle.

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    -la fascination devant la photographie de « Carol », le mélo mélancolique de Todd Haynes (l’histoire d’amour, inspirée d’un roman de Patricia Highsmith, dans le New York des années 50 entre l’employée d’un grand magasin de Manhattan et une cliente distinguée et séduisante, prisonnière d’un mariage malheureux) même si sa beauté, indéniable, trop glaciale, ne m’a pas emportée. Je n’ai ressenti ni la passion, même contenue, ni l’impossibilité de cet amour. Le regard de Cate Blanchett dans le dernier long plan du film, celui d’une femme qui réalise qu’elle va finalement avoir droit au bonheur et à l’amour auxquels elle avait cru devoir renoncer, est néanmoins d’une intensité, d’une beauté, bouleversantes. Un film porté par deux immenses comédiennes, Cate Blanchett et Rooney Mara, et sur lequel planent les ombres de Douglas Sirk et David Lean.

    macbeth

     -Puisque d’actrices il est question, restera sans aucun doute aussi, le souvenir de la prestation de Marion Cotillard, impériale, et d’une justesse sidérante dans le sombre, hypnotique et spectaculaire « Macbeth » de Justin Kurzel.

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     -le mélange d’ensorcellement et d’agacement suscité par « Mon roi » de Maïwenn à l’image de son personnage principal incarné par Vincent Cassel, dans son meilleur rôle, celui de Georgio qui suscite chez Tony (Emmanuelle Bercot), une passion étouffante et destructrice qu’elle se remémore alors qu’elle est dans un centre de rééducation après une chute de ski. Finalement cette relation amoureuse tumultueuse aurait peut-être plu davantage à Truffaut (celui de « La Femme d’à côté ») que le présomptueux « Marguerite et Julien » de Valérie Donzelli qui pourtant s’y réfère sciemment tant il illustre ce mélange de « joie et de souffrance » cher au cinéaste. Finalement ces sentiments mêlés suscités par ce film sont plutôt une preuve de sa réussite, le film exerçant sur nous le même charme, doux et âpre, la même fascination troublante que le personnage principal. Le spectateur est lui aussi sous emprise. Vincent Cassel est un Georgio diaboliquement séduisant, envoûtant, un roi autoritaire, inique, détestable et malgré tout charmant, qu’il imite un serveur dans un célèbre palace deauvillais ou qu’il jette son portable (pour « donner son portable » suite à sa rencontre avec Tony) comme un roi fier, désinvolte, lunatique, arrogant, ensorcelant comme il l’est avec le sujet de son désir. Plutôt que d’en faire un pervers narcissique caricatural, Maïwenn lui dessine des failles (une relation au père puis à sa disparition moins indifférente qu’il voudrait le laisser paraître). Face à Vincent Cassel, Emmanuelle Bercot incarne corps et âme cette femme aveuglée par l’amour qui aime follement dont, justement, le corps et l’âme souffrent et vibrent pour et par cet homme. Maïwenn n’a peur de rien, ni d’appeler son personnage féminin « Marie-Antoinette » (d’où Tony), ni du mal au genou parce que mal au « je nous », c’est ce qui agacera ou charmera mais cette audace fougueuse est plutôt salutaire dans un cinéma français parfois trop aseptisé. Un film qui dès les premières minutes, où Tony se jette à corps perdu dans le vide, nous happe pour ne plus nous lâcher jusqu’à la dernière seconde et jusqu’à la très belle scène finale. A signaler : un Louis Garrel sous un nouveau jour, irrésistiblement drôle, qui apporte une respiration dans cet amour étouffant. Après le prix du jury en 2011 pour « Polisse », avec son quatrième film seulement, Maïwenn confirme être une cinéaste de talent avec laquelle il va falloir compter. Parmi les grands moments de ce festival, l’incrédulité d’Emmanuelle Bercot (aussi réalisatrice incroyablement talentueuse, retrouvez ici ma critique du film d’ouverture « La tête haute » et, là, ma critique de « Elle s’en va », LE film de l’année 2013), lorsqu’elle a reçu son prix d’interprétation : -« Mon bonheur de devoir partager ce bonheur avec une actrice car un peu trop grand pour moi toute seule car ce prix récompense son audace, son sens aigu de la liberté, son anticonformisme. », « C’est difficile pour moi d’être ici sur cette scène sans Vincent Cassel. Vincent Cassel, mon roi c’est toi et moi, je sais ce que je te dois. » , « Merci à ce jury qui visiblement a la même dinguerie que Maïwenn, le même sens de la liberté, de la non convention. Je réalise juste que parfois la vie peut aller au-delà des rêves, ce soir, la vie va au-delà de tous mes rêves. »

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    -le souhait que ne s’achève jamais le réjouissant « Irrational man» de Woody Allen, la nouvelle comédie d’une gravité légère (qui culmine dans une scène de meurtre sur une musique joyeuse, un petit bijou d’ironie) de Woody Allen pour le cinéma duquel le terme « jubilatoire » semble avoir été inventé.   Comme dans « Match point », mensonge, hasard, Dostoïevski (forte influence à nouveau de « Crime et châtiment ») se mêlent, bien qu’il soit plus léger que son chef d’œuvre précité avec quelques scènes brillantes (toujours cette faculté incroyable à exposer une scène et écrire des dialogues caustiques) et toujours ce regard mordant, incisif sur les êtres, la vie, l’amour, la mort et une fin comme un écho en négatif à celle de « Match point ». Savoureux ! Et un Joaquin Phoenix parfait dans ce rôle de professeur de philo qui trouve une bien curieuse raison de vivre que je vous laisse découvrir (en salles, le 14 octobre).

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    -l’incapacité à parler après « Le fils de Saul » de László Nemes (et aujourd’hui encore, d’ailleurs, mais ce film DOIT être vu, montré, dans les écoles et ailleurs, parce que c’est plus que jamais nécessaire de ne pas oublier jusqu’à quelle inimaginable ignominie la haine de l’autre a pu mener), le sentiment d’avoir vu un grand film, ce film dont Thierry Frémaux en conférence de presse avait parlé comme d’un « film qui fera beaucoup parler », le premier premier film à figurer en compétition depuis 4 ans. L’action se déroule en Octobre 1944, à Auschwitz-Birkenau. Saul Ausländer est membre du Sonderkommando, ce groupe de prisonniers juifs isolé du reste du camp et forcé d’assister les nazis dans leur plan d’extermination. Il travaille dans l’un des crématoriums où il est chargé de « rassurer » les Juifs qui seront exterminés et qui ignorent ce qui les attend, puis de nettoyer… quand il découvre le cadavre d’un garçon en lequel il croit ou veut croire reconnaître son fils. Tandis que le Sonderkommando prépare une révolte (la seule qu’ait connue Auschwitz), il décide de tenter l’impossible : offrir une véritable sépulture à l’enfant afin qu’on ne lui vole pas sa mort comme on lui a volé sa vie, dernier rempart contre la barbarie. La profondeur de champ, infime, renforce cette impression d’absence de lumière, d’espoir, d’horizon, nous enferme dans le cadre avec Saul, prisonnier de l’horreur absolue dont on a voulu annihiler l’humanité mais qui en retrouve la lueur par cet acte de bravoure à la fois vain et nécessaire, son seul moyen de résister. Que d’intelligence dans cette utilisation du son, de la mise en scène étouffante, du hors champ, du flou pour suggérer l’horreur ineffable, ce qui nous la fait d’ailleurs appréhender avec plus de force encore que si elle était montrée. László Nemes s’est beaucoup inspiré de « Voix sous la cendre », un livre de témoignages écrit par les Sonderkommandos eux-mêmes. Ce film a été développé à la résidence de la Cinéfondation du Festival de Cannes 2011. Aussi tétanisant et nécessaire que Shoah de Claude Lanzmann. C’est dire… Ma palme d’or.

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    -L’étonnement admiratif devant la beauté et la richesse remarquables de chaque plan de « The Assassin » de Hou Hsia Hsien : un prix de la mise en scène incontestable.

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    -Les larmes irrépressibles à cause de « La loi du marché » de Stéphane Brizé et de l’émotion communicative de son acteur principal, dans le film, lors de son magnifique discours lors de la clôture, lors de la conférence de presse du film et lors de la conférence de presse des lauréats (oui, Vincent Lindon a beaucoup fait pleurer et ému les festivaliers). Un immense acteur qui voit enfin son talent couronné par un prix (et quel prix !) et aussi incroyable que cela puisse paraître, comme il l’a lui-même précisé, pour la première fois. « La Loi du marché » de Stéphane Brizé nous fait suivre Thierry incarné (ce mot n’a jamais trouvé aussi bien sa justification) par Vincent Lindon, un homme de 51 ans qui, après 20 mois de chômage commence un nouveau travail qui le met bientôt face à un dilemme moral. C’était un des films que j’attendais le plus et mes attentes n’ont pas été déçues. Je suis ce cinéaste, Stéphane Brizé, depuis la découverte de son film « Le bleu des villes » (qui avait obtenu le prix Michel d’Ornano au Festival du Cinéma Américain de Deauville), il m’avait ensuite bouleversée avec « Je ne suis pas là pour être aimé » et « Mademoiselle Chambon » . Une nouvelle fois et comme dans ce film précité, le mélange de force et de fragilité incarné par Lindon, de certitudes et de doutes, sa façon maladroite et presque animale de marcher, la manière dont son dos même se courbe et s’impose, dont son regard évite ou affronte : tout en lui nous fait oublier l’acteur pour nous mettre face à l’évidence de ce personnage, un homme bien (aucun racolage dans le fait que son fils soit handicapé, mais une manière simple de nous montrer de quel homme il s’agit), un homme qui incarne l’humanité face à la loi du marché qui infantilise, aliène, broie. Criant de vérité. Dès cette première scène dans laquelle le film nous fait entrer d’emblée, sans générique, face à un conseiller de pôle emploi, il nous fait oublier l’acteur pour devenir cet homme à qui son interprétation donne toute la noblesse, la fragilité, la dignité. Comme point commun à tous les films de Stéphane Brizé, on retrouve cette tendre cruauté et cette description de la province, glaciale et intemporelle. Ces douloureux silences. Cette révolte contre la lancinance de l’existence. Et ce choix face au destin. Brizé filme Lindon souvent de dos, rarement de face, et le spectateur peut d’autant mieux projeter ses émotions sur cette révolte silencieuse. Et puis, parce que ça se passe de commentaires, quelques extraits du beau discours de clôture de l’acteur dont voici quelques, un discours dont la dernière phrase m’a ravagée autant que la fin de « Mia madre », il y avait comme un écho d’ailleurs… : «  Je vous remercie d’avoir posé un regard aussi bienveillant et avec autant d’émotion sur le travail que Stéphane Brizé a fait avec moi et a fait tout court. » , «  Ils ont contribué à un des trois plus jours de ma vie. C’est un acte politique de choisir un film comme celui-là. Je dédie ce prix à ces gens qui ne sont pas toujours considérés à la hauteur de ce qu’ils méritent et aux acteurs qui ont joué avec moi sans qui je ne serais pas là, j’ai l’impression que ce n’est pas moi qui suis là. », « Une pensée pour ma maman qui n’est plus là et mon père qui n’est plus là, quand je pense que j’ai fait tout cela pour qu’ils me voient et ils ne sont plus là. »

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     -le plaisir, pour l’inconditionnelle du cinéma de Claude Sautet que je suis, d’entendre Xavier Dolan lors de sa conférence de presse sur la plage Magnum, dire ceci : « J’ai un rapport plutôt incomplet avec le cinéma français tant il y a de films à voir. J’aime beaucoup, par exemple, Claude Sautet. »

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     -vaguement incrédule, vaguement charmée, et surtout pleine de regrets devant « Valley of love » de Guillaume Nicloux auquel il ne manquait pas grand-chose pour être un vrai beau film. Isabelle et Gérard (interprétés aussi par Isabelle –Huppert- et Gérard –Depardieu-) se rendent à un étrange rendez-vous dans la Vallée de la mort, en Californie. Ils ne se sont pas revus depuis des années et répondent à une invitation de leur fils, Michael, photographe, qu’ils ont reçue après son suicide, six mois auparavant. Malgré l’absurdité de la situation, ils décident de suivre le programme initiatique imaginé par Michael. Quel pitch prometteur et original ! Ce film qui ne ressemble d’ailleurs à aucun autre aborde une réflexion sur le deuil et ce lien distordu avec le réel qu’il provoque, tellement absurde et fou, qu’il porte à croire à tout, même aux miracles. Aux frontières du fantastique qu’il franchit parfois, avec sa musique hypnotique, ses comédiens qui crèvent l’écran et un Depardieu à la présence plus forte que jamais (et il n’est pas question ici seulement de corpulence mais de sa capacité inouïe à magnétiser et occuper l’écran), le duo de Loulou reformé 35 ans plus tard, un décor qui pourrait être difficilement plus cinégénique, intrigant, fascinant, inquiétant, troisième personnage, de ce « Valley of love », de ce film se dégage un charme étrange   et envoûtant, et résulte une réflexion intéressante sur le deuil qui abolit ou suscite de nouvelles croyances (finalement l’homme ou la femme endeuillée devient peut-être cet homme irrationnel du film de Woody Allen) , finalement comme le cinéma… Lambert Wilson, maître de cérémonie de ce 68ème Festival de Cannes, lors de l’ouverture, n’a-t-il pas dit lui-même « Le cinéma, c’est le rêve, le secret, le miracle, le mystère ». Quelques moments de comédie (et un jeu avec les prénoms et les véritables identités de Gérard et Isabelle, Depardieu dans le film étant aussi un acteur), comme dans le film de Moretti qui aborde finalement le même sujet, permettent de respirer dans ce décor à perte de vue et étouffant, à l’image du deuil qui étouffe et donne cette impression d’infini et d’inconnu oppressants. Dommage qu’on ressorte avec ce sentiment d’inachevé pour ce film loin d’être inintéressant.

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    -l’amusement devant l’inexprimable stoïcisme d’Isabelle Huppert face aux truculentes déclarations de Depardieu à la conférence de « Valley of love », sans aucun doute l’intervenant le plus charismatique des 10 conférences auxquelles j’ai eu le plaisir d’assister.

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     – le souvenir de plans qui nous cueillent quand on s’y attend le moins dans « La tête haute » d’Emmanuelle Bercot : une main tendue, un « je t’aime» furtif et poignant, une fenêtre qui soudain s’est ouverte sur « Le Monde » (littéralement, si vous regardez bien…) comme ce film s’ouvre sur un espoir…Un film qui « ouvre » sur un nouveau monde, un nouveau départ et une bouffée d’optimisme. Et ça fait du bien. Une très belle idée que d’avoir placé ce film à cette place de choix (l’ouverture du festival, habituellement réservée à de plus grosses productions) et de lui donner cette visibilité. Et le souvenir d’un jeune comédien qui ne restera pas inconnu très longtemps à voir sa maturité dans le film et en conférence de presse, Rod Paradot, un nom qu’on a certainement pas fini d’entendre.

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     -L’admiration devant les images pourtant si souvent regardées de « Cléo de 5 à 7 » d’Agnès Varda lors de la clôture à l’occasion de laquelle elle a reçu une palme d’honneur, et son discours mordant, vibrant, humble, qui lui a succédé, « Un soldat, une combattante, seule femme parmi les garçons de la nouvelle vague » comme elle s’est elle-même définie, « Cette palme d’or est un plaisir surprenant » a-t-elle ajouté rappelant que, avant elle, seuls Clint Eastwood, Woody Allen, Manuel de Oliveira, Bernardo Bertolucci avaient eu cet honneur. « Je suis française , je suis femme et mes films n’ont ni gagné ni fait gagner de l’argent», « Cette palme je la reçois comme une palme de résistance et d’endurance, je la dédie à tous les cinéastes inventifs, courageux qui ne sont pas en lumière et qui continuent », « Quand je visualise une peinture de Picasso je suis de bonne humeur », « Deux palmes qui ondulent doucement dans la brise de la Croisette »a-t-elle conclu en évoquant des sanglots dans la voix celle reçue par Jacques Demy. Et le plaisir de revoir la trop rare Jane Birkin lui remettre son prix.

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     -le message du film de Luc Jacquet sur Claude Lorius, l’homme qui a scientifiquement prouvé l’inexorable réchauffement climatique dans « La glace et le ciel » (film de clôture) qui capte la beauté fragile et éblouissante d’une nature en péril. Et cette phrase finale extraite du film, comme un appel à l’action et la résistance : «  Mon histoire s’achève, et maintenant que, comme moi, vous savez, qu’allez-vous faire ? ».

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    -les images si felliniennes (mais moins que celles, réelles celles-là, vues lors de déambulations nocturnes sur la Croisette, spectacle quotidien et surréaliste) de « Youth » de Paolo Sorrentino, symphonie visuelle éblouissante qui fait valser jeunesse, vieillesse et désirs, hymne au pouvoir émotionnel de l’art, un film qui a séduit certains festivaliers autant qu’il en a agacé d’autres (le film a été applaudi et hué lors de sa projection presse) et je fais partie de la première catégorie. Tout comme « La grande Bellezza » nous parlait de laideur et non de beauté, « Youth », logiquement ne nous parle pas de jeunesse mais de vieillesse, de ce qui reste quand le temps saccage tout ou l’histoire de deux amis, l’un chef d’orchestre (formidable Michael Caine) et l’autre réalisateur (Harvey Keitel) qui profitent de leurs vacances dans un hôtel au pied des Alpes. Quand l’un a abandonné sa carrière depuis longtemps, l’autre travaille sur son dernier film… A voir aussi pour l’apparition remarquée et remarquable de Jane Fonda. Nostalgique et caustique, élégant et parfois à la limite du vulgaire, jouant de saisissants contrastes entre les corps marqués par le temps et ceux d’une jeunesse presque irréelle, entre l’apparence de sagesse et de calme (du paysage et des personnages) et ce qu’ils dissimulent, entre le souvenir du passé et sa réalité, « Youth », à l’image de son titre aime à se jouer des paradoxes, des contrastes, des trompes-l’ œil au cœur de ce paysage trompeusement serein.

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     – l’étreinte finale dans « Béliers » de Grímur Hákonarson qui a reçu le prix (amplement mérité, j’y reviendrai) Un Certain Regard ou le plan le plus poignant et inattendu du festival

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     -le délicieux vertige suggéré par la scène d’amour de « Vertigo » d’Hitchcock sublimement chorégraphiée par Benjamin Millepied qui nous a emportés dans sa danse agréablement étourdissante, le ballet se confondant avec les images du film, de James Stewart et Kim Novak, à l’image de ce festival qui enlace et entrelace réalité et cinéma au point qu’ils se confondent, comme dans une danse enivrante, et qui célèbre aussi bien le cinéma contemporain que ses classiques.

    -L’émotion lors de la clôture (grâce à Vincent Lindon et Agnès Varda) et au palmarès qui confirmait la richesse, l’inventivité, la qualité du cinéma français, cruelle leçon pour ceux qui, à tort, les mettent constamment en doute.

    Et puis, pour finir, le souvenir d’une phrase, une seule, avec laquelle je quitte ce festival, m’y accrochant férocement, une phrase de Faulkner citée par Vincent Lindon lorsqu’il a reçu son prix «faire des rêves immenses pour ne pas les perdre de vue en les poursuivant » comme un écho à la phrase d’Emmanuelle Bercot lors de la clôture « Je réalise juste que parfois la vie peut aller au-delà des rêves, ce soir, la vie va au-delà de tous mes rêves» parce que le cinéma, même social ou politique peut être porteur d’espoirs (les films de la compétition s’achevaient d’ailleurs souvent sur une note d’espoir) et de rêves et ce Festival de Cannes, même s’il a débuté une nouvelle ère (un nouveau président, un film plus fragile mais non moins sublime en ouverture) n’en a pas non plus été avare.

    Conférences de presse

    Ci-dessous, quelques phrases extraites des conférences de presse des films en compétition (ainsi que des lauréats et du jury) auxquelles j’ai eu le plaisir d’assister. Retrouvez également sur mon site Inthemoodforhotelsdeluxe.com :

    - le récit de mon déjeuner à la Cucina S.Pellegrino orchestré par Cyril Lignac

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    - et le récit de mon dîner Nespresso (dont j’ai été « l’ambassadrice d’un jour », cliquez ici pour lire mon interview sur le site de Nespresso) autour du film « Les 400 coups », orchestré par le chef Florent Ladeyn.

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    Conférences de presse des lauréats après l’annonce du palmarès

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    -Son of Saul

    « On ne voulait pas faire un drame historique mais immerger le spectateur dans une expérience, que ce soit au niveau d’un être humain » LNemes

    « J’étais surpris d’être en compétition. Ce prix est énorme. » Laszlo Nemes

    -La loi du marché

    « Je suis arrivé à une petite maturité où on espère tout et n’attend rien. Je suis prêt à recevoir. J’en suis ému, fou de joie, bouleversé. » Lindon

    « Tous les films sont grands quand il y a une grande Histoire et une petite histoire. » Lindon

    « Je suis fier de faire un rôle où les gens puissent dire, ce rôle c’est moi. » Lindon

    Quand j’ai vu le film, j’ai vu des choses de moi que je ne connaissais pas: montrer de la dignité en souffrant silencieusement etc. »Lindon

    « Être regardé par des gens qui font un cinéma sublime comme les Coen, c’est très gratifiant.  » V.Lindon

    « Ce qui me touche, c’est d’avoir interprété ce rôle, c’est comme si tous mes rôles avaient convergé pour qu’un jour je fasse ce rôle. »Lindon

    -Mon roi

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    « J’espère un jour avoir un rôle aussi beau que celui-là. Je ne serais pas là si je n’avais pas eu Vincent Cassel face à moi, acteur de génie. » Emmanuelle Bercot

    « Je n’ai pas encore pas très bien réalisé et ça me plaît d’avoir un prix ex-æquo. C’est mon 3ème prix ex-æquo à Cannes. » E.Bercot

    -The Lobster

    « Je n’essaie jamais de faire des films pour prouver des choses qui me dépassent.  » Y.Lanthimos

    « On essaie toujours de faire des choses différentes et il n’y a pas d’avis unanime. C’est normal. » Y. Lanthimos

    -Carol

    « En tant que réalisateur on est un peu dans une bulle.Les 2 actrices sont extraordinaires.Le film tient grâce au personnage de Rooney. » Todd Haynes

    Conférence de presse du jury après le palmarès

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    Joël Coen : « Cela a été une expérience très intense. Cela a changé le spectateur qui est en nous de manière très positive. « 

    « Dans 24h je commence le tournage d’un film. Je n’ai jamais discuté de films avec autant de profondeur, d’émotions. » Dolan

    « On a beaucoup admiré la façon dont le script est conté. Personnellement cela m’a beaucoup plu. » Dolan à propos de « Chronic ».

    « J’ai réagi de façon profondément émotionnelle au « Fils de Saul ». C’est un film remarquable, époustouflant. » Sienna Miller

    « Nous avons débattu de tous les films. Nous reconnaissons par ces prix l’intention et la réussite d’un réalisateur » Guillermo de Toro

    « Je le savais déjà mais je me rends compte à quel point c’est difficile de faire un bon film.  » Rossy de Palma

    Rossy de Palma : « Pour moi l’immigration est un sujet très important, on est très concernés. »

    R.Traoré : « nous n’avons pas pris en considération que tel film vienne de tel pays. La question de l’immigration n’a pas été en question ».

    « Moi je suis habituée aux seconds rôles et dommage qu’il n’y ait pas de prix pour les seconds rôles. » Roissy de Palma

    « Nous avons essayé de rendre hommage au plus grand nombre possible de très grands films. » Joel Coen

    « Lorsque nous sommes sortis du « Fils de Saul » nous sommes restés longtemps silencieux. C’est un film qui peu à peu se développe en nous. » Dolan

    « Nous avons tous notre film de prédilection dans la sélection. Nous sommes tous contents du résultat.  » S.Marceau

    « La décision a été rapide pour la palme d’or. Nous étions tous très enthousiastes » Ethan et Joel Coen qui ont par ailleurs précisé avoir voté séparément

     

     Conférences de presse des films en sélection officielle

    -« La glace et le ciel »

    « Je ne suis pas défaitiste car dans le public l’état d’esprit a changé et le film va aussi y contribuer. » Claude Lorius.

    « J’étais pessimiste mais je crois que maintenant les gens changent de point de vue. On parle désormais du réchauffement tous les jours. »CLorius

    « J’ai foi dans l’humanité. C’est souvent juste après le pire qu’elle est la meilleure. » Luc Jacquet

    « Ce qui est nouveau, c’est l’urgence. J’ai confiance. Je pense que le film touchera le citoyen. » Claude Lorius

    « Ce qui m’importe c’est de passer l’émotion et c’est de passer les sensations. » Luc Jacquet

    « La vie aventurière et exemplaire de Claude Lorius est digne d’inspirer les gens ». Luc Jacquet

    -Valley of love

    « J’étais émerveillée par le scénario. » Sylvie Pialat

    « Je ne me servirai pas du deuil de Guillaume pour le rôle car c’est 1deuil à part mais je peux imaginer le poids de ces lettres. » Depardieu

    « Je n’ai pas de vision de l’Ukraine. Je suis comme tout le monde choqué. J’adore peuple ukrainien. Ces conflits ne sont pas de mon ressort. » Depardieu

    « Monsieur Poutine, je le connais bien, je l’aime beaucoup et « l’URSS » j’y vais beaucoup ». Depardieu

    « Je connais très mal les cinéastes de maintenant. J’aime beaucoup des gens comme Audiard dont le physique me fait penser à son père. » Depardieu

    « J’adore les séries et des acteurs comme B. Willis. Je ne rechigne pas devant un bon Rossellini ou un très bon Pialat. » Depardieu

    « Je me suis rendu compte que je faisais ce métier par plaisir et parce que ça facilitait la vie. » Depardieu

    « J’ai décidé de faire ce métier car je ne voulais pas travailler. Je me suis rendu compte que je voulais vivre. » Depardieu

    « Ce film, c’est comme une lecture sur des questions essentielles dont nous avons oublié de nous souvenir. » Gérard Depardieu

    « En lisant script sur ces actes manqués de l’oubli, ces interrogations qui nous retombent dessus, je l’ai rarement lu. » Depardieu

    « J’avais vu « La Religieuse », un film qui m’avait particulièrement interpellé.  » G.Depardieu

    « L’idée de départ, qu’on s’appelle Gérard et Isabelle a créé d’emblée un aspect documentaire, un rapport particulier aux rôles. » Huppert

    « On se croit sur une autre planète dans la Vallée de la mort. On ne peut se raccrocher à rien. » Isabelle Huppert

    « Le lieu a été l’élément déclencheur de l’histoire. » Guillaume Nicloux

    -Dheepan

    « Le film s’est terminé samedi dernier. Le projet est né il y a 3/4 ans. La sélection à Cannes nous a obligés à aller très très vite. » Audiard

    « Mon film est un ou des regard(s) sur la France.  » Audiard

    « A partir de la trame initiale, c’est un scénario qui a beaucoup bougé au tournage avec les comédiens, avec l’incarnation. » Audiard

    A propos de violence « je prends au pied de la lettre notion de conflit dramatique et j’ai besoin de ça pour exacerber les sentiments ». Audiard

    « L’idée initiale était de faire un remake des « Chiens de paille » mais c’était surtout le désir d’une histoire d’amour. » Audiard

    -La loi du marché

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    « Si le personnage de Vincent Lindon avait explosé, cela aurait été un cliché et la vie est plus complexe qu’un cliché. » Stéphane Brizé

    « Ce qui fait frémir dans le film: ce ne sont que des gens qui font des choses qu’ils n’ont pas envie de faire: un combat de précarités. »Lindon

    « J’ai passé beaucoup de temps dans un supermarché. J’ai même fait un stage d’agent de sécurité. » Stéphane Brizé pour « La loi du marché ».

    « Ce que j’aime dans le cinéma de Brizé: il met le spectateur en état de questionnements qui nous fait nous politiser tout doucement. »Lindon

    « Je pense que c’est une bonne chose que de nombreux films à Cannes soient des films sociaux, ce sont ces films-là qui restent. » Lindon

    « C’est quelqu’un par lequel on a envie d’être protégé et qu’on a envie de protéger. » Stéphane Brizé à propos du choix de Vincent Lindon.

    « Le dispositif dans La Loi du Marché » est une façon de faire du cinéma que je n’avais jamais appréhendée auparavant. » Vincent Lindon

    « Ma quête constante est de filmer du réel, que face à la caméra il y ait le plus de réel possible et de vérité possible. » S.Brizé

    « C’est Vincent (Lindon), le boxeur dans les cordes que je voulais avant tout filmer ». Stéphane Brizé

    « Commencer d’emblée par la première scène sans générique était une volonté dès l’écriture du scénario », explique Stéphane Brizé.

    -Mon roi

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     » Je me suis retrouvé sur un terrain que je ne connaissais pas. Une liberté apparente totale. » #Monroi Vincent Cassel

    « C’est un film que je ne fais que réécrire depuis 10 ans. » Maïwenn #monroi

    « J’avais fait 1 trilogie narcissique, j’avais envie de dépenser mon énergie pour les acteurs. » Maïwenn expliquant ainsi pourquoi elle ne joue pas dans « Mon roi » .

    -Xavier Dolan (conférence sur la plage Magnum)

    « Je lis absolument toutes les critiques et j’en apprends beaucoup de ces critiques. Mon conseil: il faut être ouvert à la critique. » X.Dolan

    « J’ai un rapport plutôt incomplet avec le cinéma français tant il y a de films à voir. J’aime beaucoup par exemple Claude Sautet. »X.Dolan

    « Je ne crois pas qu’écrire un court soit plus facile. C’est très difficile à structurer.  » Xavier Dolan

    « C’est intimidant pour moi de coacher des gens mais j’adore toutes les étapes de la production ». Xavier Dolan

    -Mia madre

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    « Je pense que le scénario était pertinent. C’était un défi passionnant. Moretti est très précis. Cela a été une excellente expérience ».Torturro

    « La manière de regarder mes films du public international: sans les interférences qu’il y a en Italie liées à mes opinions politiques. » Moretti

    « Pendant l’écriture nous avons mêlé plusieurs degrés de narration : rêves, fantasmes, film, réalité, souvenirs… ». Moretti

    « J’ai été très touché par le scénario. J’ai beaucoup aimé travailler sur ce film ». John Torturro

    « C’est un film sur ce qu’il reste des personnes qui meurent: les souvenirs, les livres… ». Moretti -

    « N’importe quel sujet peut produire un bon film ou un mauvais film. » Moretti

    « Le rôle du cinéma est de faire des bons films, si possible novateurs et qui ne donnent pas l’impression qu’on les a déjà vus. » Moretti

    -La tête haute

    « Pour être star, il faut du glamour et du secret, ne pas tout montrer de sa vie privée. » Catherine Deneuve

     « Moi c’est le scénario qui m’a beaucoup plu et tous les personnages. C’est un scénario qui m’a plu tout de suite. » Catherine Deneuve

    « En France, les femmes cinéastes ont largement la place de s’exprimer et énormément de femmes émergent. » E.Bercot

    « Ouvrir le festival avec ce film est aussi une réponse à ce début d’année difficile qu’a connu la France. » Catherine Deneuve

    « Il y a une matière documentaire très forte dans l’écriture, en revanche je ne voulais pas un style documentaire dans l’image. » Bercot

    Sara Forestier : « A la lecture du scénario, j’ai pleuré. Le film m’a piqué le cœur. »

    « C’est totalement inespéré que ce film soit à une telle place, c’est un grand honneur. » Emmanuelle Bercot

    « Je tenais à ce que tout soit absolument juste » -Emmanuelle Bercot (à propos de tout ce qui se passe dans le cadre judiciaire où elle a fait plusieurs stages avec ce souci de vraisemblance et même de véracité). « Les personnages existaient avant les stages puis ont été nourris par la part documentaire ».« La justice des mineurs est un honneur de la France » – Emmanuelle Bercot

    « Si c’est méchant, j’espère que c’est drôle ». – Catherine Deneuve à propos d’une question d’une journaliste au sujet de la caricature de Charloe Hebdo (très cruelle) à son sujet et qu’elle n’avait pas encore vue.

    « C’était très important pour moi que ce film ait son socle dans le Nord. » Emmanuelle Bercot« Ouvrir le festival avec ce film est aussi une réponse à ce début d’année difficile qu’a connu la France. » Catherine Deneuve

    « En France, les femmes cinéastes ont largement la place de s’exprimer et énormément de femmes émergent. » E.Bercot

    « Moi c’est le scénario qui m’a beaucoup plu et tous les personnages. C’est un scénario qui m’a plu tout de suite. » Catherine Deneuve

    « Pour être star, il faut du glamour et du secret, ne pas tout montrer de sa vie privée. » – Catherine Deneuve

    « Il y a une matière documentaire très forte dans l’écriture, en revanche je ne voulais pas un style documentaire dans l’image. » Bercot

    Sara Forestier : « A la lecture du scénario, j’ai pleuré. Le film m’a piqué le coeur. »

    « C’est totalement inespéré que ce film soit à une telle place, c’est un grand honneur. » Emmanuelle Bercot

    Voici le palmarès décerné par le jury présidé par Ethan et Joel Coen et composé de Rossy de Palma, Sophie Marceau, Sienna Miller, Rokia Traoré, Guillermo del Toro, Xavier Dolan, Jake Gyllenhaal .

    La cinéaste et artiste française Agnès Varda a reçu une Palme d’or d’honneur pour l’ensemble de son oeuvre des mains de Jane Birkin.

    COMPÉTITION DES LONGS MÉTRAGES

    Palme d’or

    DHEEPAN réalisé par Jacques AUDIARD

    Grand Prix

    SAUL FIA (Son of Saul / Le fils de Saul) réalisé par László NEMES

    Prix de la mise en scène

    HOU Hsiao-Hsien pour NIE YINNIANG (The Assassin)

    Prix du Jury

    THE LOBSTER réalisé par Yorgos LANTHIMOS

    Prix d’interprétation féminine

    Rooney MARA dans CAROL réalisé par Todd HAYNES

    Emmanuelle BERCOT dans MON ROI réalisé par MAÏWENN

    Prix d’interprétation masculine

    Vincent LINDON dans LA LOI DU MARCHÉ (The Measure of a Man) réalisé par Stéphane BRIZÉ

    Prix du scénario

    Michel FRANCO pour CHRONIC

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    COMPÉTITION DES COURTS MÉTRAGES

    Palme d’or

    WAVES ’98 réalisé par Ely DAGHER

    UN CERTAIN REGARD

    PRIX UN CERTAIN REGARD

    HRÚTAR (Béliers / Rams) de Grímur Hákonarson

    PRIX DU JURY

    ZVIZDAN (Soleil de plomb / The High Sun) de Dalibor Matanić

    PRIX DE LA MISE EN SCENE

    Kiyoshi Kurosawa pour KISHIBE NO TABI (Vers l’autre rive / Journey to the Shore)

    PRIX UN CERTAIN TALENT

    COMOARA (Le Trésor / Treasure) de Corneliu Porumboiu

    PRIX DE L’AVENIR Ex aequo

    MASAAN de Neeraj Ghaywan

    NAHID d’Ida Panahandeh

    CAMÉRA D’OR

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    LA TIERRA Y LA SOMBRA réalisé par César Augusto ACEVEDO présenté dans le cadre de la Semaine de la Critique

    CINÉFONDATION

    Premier Prix

    SHARE réalisé par Pippa Bianco

    AFI’s Directing Workshop for Women, États-Unis

    Deuxième Prix

    LOCAS PERDIDAS réalisé par Ignacio Juricic Merillán

    Carrera de Cine y TV Universidad de Chile, Chili

    Troisième Prix ex aequo

    THE RETURN OF ERKIN réalisé par Maria Guskova

    High Courses for Scriptwriters and Film Directors, Russie

    Troisième Prix ex aequo

    VICTOR XX réalisé par Ian Garrido López

    ESCAC, Espagne

    Le Jury de la CST a décerné le PRIX VULCAIN DE L’ARTISTE-TECHNICIEN à :

    Tamas ZANYI, ingénieur du son, pour la contribution exceptionnelle du Son à la narration du film SAUL FIA (Son of Saul / Le fils de Saul) réalisé par László NEMES.

    Prochain festival à suivre en ici, le Festival du Film de Cabourg, du 10 au 14 juin et, en attendant, je m’en vais dès cet après-midi rattraper « Trois souvenirs de ma jeunesse » de Desplechin. Quelques clichés supplémentaires de ce 68ème Festival de Cannes  des coulisses de la dernière du Grand Journal de Canal + à la soirée Swarovski et la soirée L’Oréal en passant par des clichés des marches et de la Croisette, l’article que le journal Ouest-France m’a consacré…

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    Catégories : CLÔTURE (cérémonies/films), IN THE MOOD FOR NEWS, PALMARES Lien permanent 0 commentaire Pin it! Imprimer
  • Critique de "La Sirène du Mississipi" de François Truffaut (hommage du Festival de Cannes 2011 à Jean-Paul Belmondo)

    Dans le cadre de l'hommage du Festival de Cannes 2011 à Jean-Paul Belmondo, dont je vous parlais hier, ici, je vous propose aujourd'hui la critique de "La Sirène du Mississipi" de François Truffaut.

    "La Sirène du Mississipi" de François Truffaut (1969): entre joie et souffrance...

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    Après « Baisers volés » (1969) et « La Femme d’à côté » (1981), pour cet hommage à Jean-Paul Belmo,do, je poursuis également le cycle consacré à François Truffaut sur inthemoodforcinema.com, en remontant un peu dans le temps, avec « La Sirène du Mississipi », un film sorti en 1969. Dédié à Jean Renoir, adapté, scénarisé et dialogué par Truffaut d’après un roman de William Irish intitulé « Waltz into Darkness » (pour acquérir les droits François Truffaut dut emprunter à Jeanne Moreau, Claude Lelouch et Claude Berri), c’est davantage vers le cinéma d’Alfred Hitchcock, que lorgne pourtant ce film-ci, lequel Hitchcock s’était d’ailleurs lui-même inspiré d’une nouvelle de William Irish pour « Fenêtre sur cour ». Truffaut avait lui-même  aussi déjà adapté William Irish pour « La mariée était en noir », en 1968.

     

    Synopsis : Louis Mahé (Jean-Paul Belmondo) est fabriquant de cigarettes à La Réunion.  Il doit épouser Julie Roussel qu’il a rencontrée par petite annonce et dont il doit faire la connaissance le jour du mariage. Lorsqu’elle débarque  à La Réunion, d’une beauté aussi froide que ravageuse, elle ressemble peu à la photo qu’il possédait d’elle. Elle lui affirme ainsi lui avoir envoyé un faux portrait, par méfiance.  Peu de temps après le mariage, l’énigmatique Julie s’enfuit avec la fortune de Louis. Louis engage alors le solitaire et pointilleux détective Comolli (Michel Bouquet) pour la rechercher, et il rentre en France. Après une cure de sommeil à Nice, il retrouve Julie qui se nomme en réalité Marion (Catherine Deneuve) par hasard, elle travaille désormais comme hôtesse dans une discothèque. Il est déterminé à la tuer mais elle l’apitoie en évoquant son enfance malheureuse et ses sentiments pour lui qui l’aime d’ailleurs toujours… Commence alors une vie clandestine pour ce singulier couple.

     

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    Ce film connut un échec public et critique à sa sortie. Truffaut expliqua ainsi cet échec : « Il est aisé d’imaginer ce qui a choqué le monde occidental. La Sirène du Mississipi montre un homme faible (en dépit de son allure), envoûté par une femme forte (en dépit de ses apparences) ». Voir ainsi  Belmondo ravagé par la passion qui lui sacrifie tout explique pour Truffaut l’échec du film. C’est vrai que ce film peut dérouter après « Baisers volés », quintessence du style Nouvelle Vague.  Son romantisme échevelé, sombre, voire désespéré (même si Doinel était déjà un personnage romantique) mais aussi son mélange des genres (comédie, drame, film d’aventures, film noir, policier) ont également pu dérouter ceux qui voyaient avant tout en Truffaut un des éminents représentants de la Nouvelle Vague.

     

     Comme chacun de ses films « La Sirène du Mississipi » n’en révèle pas moins une maîtrise impressionnante de la réalisation et du sens de la narration, des scènes et des dialogues marquants, des références (cinématographiques mais aussi littéraires) intelligemment distillées et le touchant témoignage d’un triple amour fou : de Louis pour Marion, de Truffaut pour Catherine Deneuve, de Truffaut pour le cinéma d’Hitchcock.

                           

     Truffaut traite ainsi de nouveau d’un de ses thèmes de prédilections : l’amour fou, dévastateur, destructeur. Malgré la trahison de la femme qu’il aime, Louis tue pour elle et la suit au péril de sa propre existence… Après les premières scènes, véritable ode à l’île de La Réunion qui nous laisse penser que Truffaut va signer là son premier film d’aventures, exotique, le film se recentre sur leur couple, la troublante et trouble Marion, et l’amour aveugle qu’elle inspire à Louis. Truffaut traitera ce thème de manière plus tragique, plus subtile, plus précise encore dans « L’Histoire d’Adèle.H », dans « La Peau douce » (réalisé avant « La Sirène du Mississipi)  notamment ou, comme nous l’avons vu, dans « La Femme d’à côté », où, là aussi, Bernard (Gérard Depardieu) emporté par la passion perd ses repères sociaux, professionnels, aime à en perdre la raison avec un mélange détonant de douceur et de douleur, de sensualité et de violence, de joie et de souffrance dont « La sirène du Mississipi » porte déjà les prémisses.

     

    Bien qu’imprégné du style inimitable de Truffaut, ce film est donc aussi une déclaration d’amour au cinéma d’Hitchcock, leurs entretiens restant le livre de référence sur le cinéma hitchcockien (si vous ne l’avez pas encore, je vous le conseille vivement, il se lit et relit indéfiniment, et c’est sans doute une des meilleures leçons de cinéma qui soit). « Les Oiseaux », « Pas de printemps pour Marnie », « Sueurs froides», « Psychose », autant de films du maître du suspense auxquels se réfère « La Sirène du Mississipi ». Et puis évidemment le personnage même de Marion interprétée par Catherine Deneuve, femme fatale ambivalente, d’une beauté troublante et mystérieuse, d’une blondeur et d’une froideur implacables, tantôt cruelle, tantôt fragile, empreinte beaucoup aux héroïnes hitchcockiennes, à la fois à Tippie Hedren dans « Pas de printemps pour Marnie » ou à Kim Novak dans « Sueurs froides » notamment pour la double identité du personnage  dont les deux prénoms (Marion et Julie) commencent d’ailleurs comme ceux de Kim Novak dans le film d’Hitchcock- Madeleine et Judy-.

     

     A Deneuve, qui vient d'accepter le film, Truffaut écrivit : « Avec La Sirène, je compte bien montrer un nouveau tandem prestigieux et fort : Jean-Paul, aussi vivant et fragile qu'un héros stendhalien, et vous, la sirène blonde dont le chant aurait inspiré Giraudoux. » Et il est vrai qu’émane de ce couple, une beauté ambivalente et tragique, un charme tantôt léger tantôt empreint de gravité. On retrouve Catherine Deneuve et Jean-Paul Belmondo dans des contre-emplois dans lesquels ils ne sont pas moins remarquables. Elle en femme fatale, vénale, manipulatrice, sirène envoûtante mais néanmoins touchante dont on ne sait jamais vraiment si elle aime ou agit par intérêt. Lui en homme réservé, follement amoureux, prêt à tout par amour, même à tuer.

     

     A l’image de l’Antiquaire qui avait prévenu Raphaël de Valentin dans « La Peau de chagrin » à laquelle Truffaut se réfère d’ailleurs, Louis tombant par hasard sur le roman en question dans une cabane où ils se réfugient ( faisant donc de nouveau référence à Balzac après cette scène mémorable se référant au « Lys dans la vallée » dans « Baisers volés »), et alors que la fortune se réduit comme une peau de chagrin,  Marion aurait pu dire à Louis : «  Si tu me possèdes, tu possèderas tout, mais ta vie m'appartiendra ».

     

    Enfin  ce film est une déclaration d’amour de Louis à Marion mais aussi et surtout, à travers eux, de Truffaut  à Catherine Deneuve comme dans cette scène au coin du feu où Louis décrit son visage comme un paysage, où l’acteur semble alors être le porte-parole du cinéaste. Le personnage insaisissable, mystérieux de Catherine Deneuve contribue largement à l’intérêt du film, si bien qu’on imagine difficilement quelqu’un d’autre interprétant son rôle.

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    Comme souvent, Truffaut manie l’ellipse avec brio, joue de nouveau avec les temporalités pour imposer un rythme soutenu. Il cultive de nouveau le hasard comme dans « Baisers volés » où il était le principal allié de Doinel, pour accélérer l’intrigue.

     

    Alors, même si ce film n’est pas cité comme l’un des meilleurs de Truffaut, il n’en demeure pas moins fiévreux, rythmé, marqué par cette passion, joliment douloureuse, qui fait l’éloge des grands silences et que symbolise si bien le magnifique couple incarné par Deneuve et Belmondo. Avec « La Sirène du Mississipi » qui passe brillamment de la légèreté au drame et qui dissèque cet amour qui fait mal, à la fois joie et souffrance, Truffaut signe le film d’un cinéaste et d’un cinéphile comme récemment Pedro Almodovar avec « Les Etreintes brisées ».

     

     « La Sirène du Mississipi » s’achève par un plan dans la neige immaculée qui laisse ce couple troublant partir vers son destin, un nouveau départ, et nous avec le souvenir ému de cet amour fou dont Truffaut est sans doute le meilleur cinéaste.

     

    Dix ans plus tard, Catherine Deneuve interprétera de nouveau une Marion dans un film de Truffaut « Le dernier métro », et sera de nouveau la destinataire d’ une des plus célèbres et des plus belles répliques de Truffaut, et du cinéma, que Belmondo lui adresse déjà dans « La Sirène du Mississipi »:

     

     « - Quand je te regarde, c'est une souffrance.

    - Pourtant hier, tu disais que c'était une joie.

    - C'est une joie et une souffrance.''

     

    Sans doute une des meilleures définitions de l’amour, en tout cas de l’amour dans le cinéma de Truffaut… que nous continuerons à analyser prochainement avec « L’Histoire d’Adèle.H ». En attendant je vous laisse méditer sur cette citation et sur le chant ensorcelant et parfois déroutant de cette insaisissable « Sirène du Mississipi ». 

     

    Bonus: le trailer de "La Sirène du Mississipi"

     

    Catégories : HOMMAGES DU FESTIVAL Lien permanent 0 commentaire Pin it! Imprimer
  • "Je veux voir" de Joana Hadjithomas er Khalil Joreige, avec Catherine Deneuve: Un Certain Regard...

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    Photos "In the mood for Cannes": L'équipe du film "Je veux voir".

    Alors que dehors des rafales de vent et des pluies torrentielles s’abattent sur la Croisette, je profite de ces quelques minutes de calme pour écrire : un  silence, une pause dans la frénésie cannoise  presque déstabilisante me faisant réaliser que cette vie irréelle ne dure que l’espace de 12 jours et s’achèvera dans ce qui me semble être une délicieuse éternité, que la réalité peut reprendre ses droits, qu’elle le fera. Quelques minutes pour faire un flash-back sur toutes ces images de vie et de cinéma contrastées, fortes dans les deux cas,  lumineuses (dans le premier cas) et sombres (dans le second), oniriques (dans le premier cas) et cauchemardesques (dans le second). Entre apesanteur réelle et pesanteur fictive, écartelée entre des émotions que même la tempête ne balaiera pas, tout juste se fera-t-elle l’écho de leur puissance, de leur violence presque fascinante. Quelques minutes donc pour évoquer la projection de cet après-midi dans la section Un Certain Regard : « Je veux voir » réalisé par Joana Hadjithomas et Khalil Joreige dans lequel « joue » Catherine Deneuve.

    Pitch par l’équipe du film : « Juillet 2006. Une guerre éclate au Liban. Une nouvelle guerre mais pas une de plus, une guerre qui vient briser les espoirs de paix et l'élan de notre génération.  Nous ne savons plus quoi écrire, quelles histoires raconter, quelles images montrer. Nous nous demandons : " Que peut le cinéma ? ".
    Cette question, nous décidons de la poser vraiment. Nous partons à Beyrouth avec une " icône ", une comédienne qui représente pour nous le cinéma, Catherine Deneuve. Elle va rencontrer notre acteur fétiche, Rabih Mroué.  Ensemble, ils parcourent les régions touchées par le conflit. A travers leurs présences, leur rencontre, nous espérons retrouver une beauté que nos yeux ne parviennent plus à voir.  Une aventure imprévisible, inattendue commence alors…. ».

    Lors de la présentation du film au public, Khalil Joreige a déclaré : "Nous sommes très émus de présenter ce film aujourd’hui. Nous remercions Thierry Frémaux et l’équipe du Festival. Pour nous, ce film est une vraie aventure cinématographique qui, vous le verrez, devient de plus en plus intense et surprenante. Nous tenons à remercier Catherine Deneuve pour sa générosité et son audace, pour nous avoir permis de faire ce film." Et Joana Hadjithomas de conclure : "Je dédie cette projection à ceux qui auraient voulu être avec nous : notre équipe, nos familles, nos amis qui n’ont pas pu faire le voyage à cause des derniers événements."

    C’est donc de nouveau en miroir du monde pour reprendre les termes de Steve Mc Queen, le réalisateur de « Hunger » dont je vous parlais avant-hier que se positionne ce film. Un miroir dans lequel se reflètent et s’influencent intelligemment sa beauté et sa laideur, sa vérité et sa mythologie, sa réalité et sa fiction. « Je veux voir » est en effet un film inclassable qui mélange intelligemment fiction et documentaire, un mélange duquel résulte alors une impression troublante qui ne nuit pas au propos mais au contraire le renforce, paradoxalement le crédibilise. Un Certain Regard. Le nom de cette sélection était parfaitement choisi pour accueillir ce film. De regards il y est en effet beaucoup question.  Celui magnétique, troublé, inquiet, empathique, curieux de Catherine Deneuve. Un regard certain, en apparence en tout cas. C’est donc son regard ( elle est tantôt filmée de face, tantôt en caméra subjective) qui guide le nôtre. Le film commence ainsi : Catherine Deneuve est filmée de dos, à la fenêtre, à Beyrouth qu’elle regarde et surplombe. De dos avec cette silhouette tellement reconnaissable, celle de l’icône qu’elle représente pour les cinéastes qui l’ont choisie. Elle dit alors qu’elle veut voir. Elle veut voir les traces de la guerre. Elle veut voir ce qui ne lui paraît pas réel à travers l’écran de télévision (décidément, les films se répondent, troublant écho à celui d’hier).

    Cette rencontre ensuite avec Rabih Mroué qui sera son guide et chauffeur sonne tellement juste, semble tellement éclore sous nos yeux que nous sommes presque gênés d’être là et en même temps captivés. Catherine Deneuve, son personnage, qu’importe, demande si elle peut fumer autant par politesse que pour amorcer une conversation, une complicité, puis elle s’interroge sur le fait que Rabih ne mette pas de ceinture. Il lui explique que depuis la guerre les principes ont un peu volé en éclats. Elle précise qu’elle n’est pas pour l’ordre mais que c’est quand même dangereux. Son visage ne trahit presque aucune émotion et n’en est justement que plus émouvant, de même lorsqu’elle demande pour la deuxième fois si elle peut fumer et reparle de la ceinture de sécurité après un évènement dangereux. Comme si ces propos trahissaient sa peur et la rassuraient, leur réitération les rendant tragiquement drôles. Son ton posé contraste avec l’inquiétude que trahit ses paroles.

    Peu à peu ils s’éloignent de Beyrouth, on leur interdit de filmer, ou le scénario prévoyait qu’on fasse croire qu’on leur interdisait de filmer. Le résultat est le même. Nous ne savons pas. Que ce soit fictif ou réel l’essentiel est que cela soit tellement évocateur. Un avion passe et émet un puissant fracas, comme une bombe que l’on lâcherait. Catherine Deneuve sursaute et pour la première fois ou presque son corps trahit sa peur. Le chauffeur lui explique que l’avion  israélien a passé le mur du son, que le but est juste de faire peur. Rare évocation de la situation politique. Le film est là pour nous permettre de voir, pas pour nous prendre à parti ou expliquer. Juste voir la désolation après et à travers la beauté. Juste pour voir ce contraste violent et magnifique.

    Que ce soit Catherine Deneuve ou son personnage qui sursaute en entendant cet avion, peu importe, la peur se transmet, traverse l’écran, nous atteint, comme le sentiment de désolation de ces carcasses d’acier et de ferrailles que des pelleteuses charrient longuement, symboles de tant de vies et de passés volés en éclat, abattus, piétinés, niés.

    La relation semble se nouer entre les deux personnages ( ?) sous nos yeux , entre les deux êtres ( ?) peut-être, une relation faîte de pudeur, d’intensité créée par la peur, la force de cette rencontre, son caractère unique et son cadre atypique (la scène où il lui dit les dialogues de « Belle de jour » en Arabe, où il en oublie d’être attentif et se retrouve dans un endroit miné est à la fois effrayante et sublime, poétique et terriblement réaliste, l’instant poétique, cinématographique qu’ils vivent renforçant la peur créée par la soudaineté du surgissement d’une terrible réalité, potentiellement fatale). Une relation entre deux réalités, le cinéma et la réalité. Une belle rencontre en tout cas. Comme deux personnages de cinéma. Si réels (nous croyons vraiment à leur relation) et si cinématographique (ils forment sous nos yeux un couple qui pourrait être tellement cinématographique).

     La fin (Catherine Deneuve se rend à une réception en son honneur après cette journée que l’on devine si intense et éprouvante) pourrait être le début d’une fiction, une des plus belles fins qu’il m’ait été donné de voir au cinéma, qui prouve la force d’un regard, un regard décontenancé, un regard ébloui par les lumières d’une fête tellement décalées après celles de la journée, un regard qui cherche la complicité de celui devenu un ami, un regard qui cherche la réalité de ce qu’il a vécu ou ressenti dans celui d’un autre, un regard qui nous embarque dans son tourbillon d’émotions et d’intensité, tandis qu’un officiel obséquieux (non?) évoque « la formidable capacité de résilience des Libanais » comme il évoquerait la pluie et le beau temps. Le regard alors tellement passionné de Catherine Deneuve contraste avec la banalité du discours de ce dernier. Oui, un certain regard. Tellement troublé et troublant et expressif lorsqu’il croise le regard attendu qu’il ouvre une infinitude de possibles, qu’il ouvre sur le rêve, qu’il ouvre sur la puissance du cinéma, des images, d’une rencontre, qu’il ouvre sur un nouvel espoir. "Toute la beauté du monde". Malgré tout.

     La présence presque "improbable" et "onirique" de Catherine Deneuve comme l’ont définie les réalisateurs est à la fois un écho à la beauté du sud et un contraste saisissant avec le spectacle de désolation des paysages en ruine, des vies dévastées.  Elle y apparaît en tout cas magnifique de dignité et de courage. Oui, une belle leçon de dignité et de courage mais aussi de cinéma et d’espoir…

    Un film qui est dramatiquement (encore une fois) d’actualité alors que le Liban vit de nouveau une situation explosive, qui montre ce que l’on regarde parfois sans voir.

    Le mélange si habile de fiction et de documentaire, de mémoire historique et de mythologie cinématographique,  en fait un film, un témoignage aussi, inclassable, captivant, troublant,  jamais didactique, un film que l’on veut voir, et que l’on voudrait revoir, juste pour ce dernier regard échangé…

    Et puis en sortant, je me suis retrouvée à l’extérieur de la salle en même temps que Catherine Deneuve. Moi qui ne le fais jamais (autrement que  lorsque les équipes de films sont sur une scène ou dans une salle de cinéma), j’ai pris une photo. Juste pour immortaliser cet instant. Retenir ce regard. Celui du film ou de la réalité, ou des deux subtilement liés, d’un moment intense en tout cas…

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    Catherine Deneuve à la sortie de la projection de "Je veux voir". Photo "In the mood for Cannes"

    Sandra.M

    Catégories : UN CERTAIN REGARD Lien permanent 2 commentaires Pin it! Imprimer
  • La leçon de cinéma de Quentin Tarantino

    1842948812.jpgLes leçons de cinéma constituent chaque année un des temps forts du festival  (accessibles sur badge) et cette année 2008 ne devrait pas déroger à la règle puisqu’on vient de nous annoncer que Quentin Tarantino donnerait cette année la traditionnelle leçon de cinéma.

    De grands noms l’ont précédé à commencer par Martin Scorsese l’an passé (cliquez ici pour lire mon récit de la leçon de cinéma de Martin Scorsese au Festival de Cannes 2007) ou encore Stephen Frears, Nanni Moretti, Wong Kar Wai, Sydney Pollack ou encore des comédien(ne)s comme Catherine Deneuve (cliquez ici pour lire mon récit de la leçon de cinéma de Catherine Deneuve au Festival de Cannes 2005).

    Quentin Tarantino est un habitué de la Croisette qu’il a d’abord arpentée en tant que sélectionné de la compétition officielle avec « Reservoir Dogs » , en 1992. En 1994 il revenait en compétition avec « Pulp Fiction », le jury présidé par Clint Eastwood lui avait alors attribué la palme d’or.

    En 2004, c’est en tant que président du jury qu’il revenait à Cannes (Michael Moore avait alors reçu la palme d’or pour "Fahrenheit 9/11"), tout en présentant « Kill bill  2 » hors compétition.

    Enfin, il est revenu l’an passé en compétition avec « Death proof » (Boulevard de la mort), vous pouvez voir la vidéo de la montée des marches de l’équipe du film dans la colonne de gauche du blog.

    Vous pourrez bien sûr retrouver le récit de la leçon de cinéma de Quentin Tarantino sur ce blog.

    FILMOGRAPHIE DE QUENTIN TARANTINO

    En tant qu’acteur

    Sukiyaki Western Django (Prochainement), de Takashi Miike

    1294731847.jpgDiary of the Dead - Chronique des morts vivants (2008), de George A. Romero  

    Planète terreur - un film Grindhouse (2007), de Robert Rodriguez

    Boulevard de la mort - un film Grindhouse (2007), de Quentin Tarantino

    Michael Moore : Polémique Système (2007), de Rick Caine

    Z Channel : Une Obsession Magnifique (2004), de Alexandra Cassavetes

    Alias (2003) - Saison 3 SÉRIE TV épisode : 13

    Alias (2001) - Saison 1 SÉRIE TV  épisode : 12,

    Little Nicky (2000), de Steven Brill  

    Jackie Brown (1998), de Quentin Tarantino

    Full Tilt Boogie (1997), de Sarah Kelly

    Une nuit en enfer (1996), de Robert Rodriguez

    Girl 6 (1996), de Spike Lee

    Desperado (1995), de Robert Rodriguez

    Somebody to love (1995), de Alexandre Rockwell

    302169733.jpgGroom service (1995), de Allison Anders Chester

    Sleep With Me (1994), de Rory Kelly

    Pulp Fiction (1994), de Quentin Tarantino

    Reservoir Dogs (1992), de Quentin Tarantino

    Le Magicien d'Oz des Muppets, de Kirk R. Thatcher

    En tant que réalisateur

      Kill Bill : volume 3 (Prochainement)

    Kill Bill : volume 4 (Prochainement)

    The Inglorious Bastard (projet) (Prochainement)

    Boulevard de la mort - un film Grindhouse (2007)

    Grindhouse (2007)

    Sin City (2005)

    Kill Bill : volume 2 (2004)

    Les Experts (2004) - Saison 5 SÉRIE TV

    épisode : 24, 25

      Kill Bill : volume 1 (2003)  

    Jackie Brown (1998)

    Groom service (1995)

    Pulp Fiction (1994)

    Urgences (1994) - Saison 1 SÉRIE TV épisode : 25

    Reservoir Dogs (1992)

    En tant que scénariste

    Kill Bill : volume 3 (Prochainement), de Quentin Tarantino

    Kill Bill : volume 4 (Prochainement), de Quentin Tarantino

    The Inglorious Bastard (projet) (Prochainement), de Quentin Tarantino

    Boulevard de la mort - un film Grindhouse (2007), de Quentin Tarantino

    Grindhouse (2007), de Quentin Tarantino

    Kill Bill : volume 2 (2004), de Quentin Tarantino

    Kill Bill : volume 1 (2003), de Quentin Tarantino

    Jackie Brown (1998), de Quentin Tarantino

    Rock (1996), de Michael Bay

    Une nuit en enfer (1996), de Robert Rodriguez

    Groom service (1995), de Allison Anders

    Pulp Fiction (1994), de Quentin Tarantino

    Tueurs nés (1994), de Oliver Stone

    True Romance (1993), de Tony Scott

    Reservoir Dogs (1992), de Quentin Tarantino

    En tant que producteur

    Hell Ride (Prochainement), de Larry Bishop

    Planète terreur - un film Grindhouse (2007), de Robert Rodriguez

    Boulevard de la mort - un film Grindhouse (2007), de Quentin Tarantino

    Grindhouse (2007), de Quentin Tarantino

    Kill Bill : volume 2 (2004), de Quentin Tarantino

    En tant que directeur de la photographie

    Boulevard de la mort - un film Grindhouse (2007), de Quentin Tarantino

    En tant que producteur exécutif

    Daltry Calhoun (Prochainement), de Katrina Holden Bronson

    Killshot (Prochainement), de John Madden

    Hostel - Chapitre II (2007), de Eli Roth

    Hostel (2006), de Eli Roth  

    Sang-froid (1997), de Reb Braddock

    Une nuit en enfer (1996), de Robert Rodriguez

     Groom service (1995), de Allison Anders

    Killing Zoe (1994), de Roger Avary

    En tant que producteur associé

    Past Midnight (1992), de Jan Eliasberg

     

    Catégories : LEçONS DE CINEMA Lien permanent 4 commentaires Pin it! Imprimer
  • La leçon de cinéma 2007 par Martin Scorsese: invité d'exception du 6Oème anniversaire du Festival

    medium_18680972.2.JPGMartin Scorsese donnera pour le 60e Festival une Leçon de cinéma d'exception : après Oliver Stone, Nanni Moretti et Sydney Pollack, il viendra évoquer son métier de réalisateur et sa passion pour le cinéma.

    En outre, Martin Scorsese, entouré de plusieurs cinéastes, annoncera pendant le Festival de Cannes le lancement de la World Cinema Foundation, vouée à la préservation et la restauration des chefs d'œuvre du cinéma mondial.

    Enfin, le Dimanche 27 mai, lors la cérémonie de clôture, il remettra le prix de la Caméra d'or au réalisateur du meilleur premier film présenté au Festival de Cannes.

    Palme d'or en 1976 avec Taxi Driver et Président du Jury en 1998, Martin Scorsese a remporté cette année l'Oscar du meilleur réalisateur et celui du meilleur film avec The Departed (Les Infiltrés).

     Pour vous donner une idée de ce que sont ces leçons de cinéma qui constituent toujours un des évènements  du Festival, ci-dessous mon récit de la leçon de cinéma donnée par Catherine Deneuve lors du Festival de Cannes 2005:

    LECON DE CINEMA DE Mme CATHERINE DENEUVE AU FESTIVAL DE CANNES 2005

    "Le premier rendez-vous de ce jeudi 12 Mai 2005 a eu lieu salle Bunuel avec "Belle de jour"...enfin Catherine Deneuve...Salle Bunuel la bien nommée donc. La petitesse de la salle procure toujours à ces rencontres avec des cinéastes ou acteurs un ton de confidence. Cette fois le confesseur a pris les traits de Frédéric Mitterrand. Agnès Varda, membre du jury, tente de se faufiler discrètement dans la salle. Peine perdue. Dans la file d'attente des spectateurs la remarquent. Ainsi glane-t-elle autant de compliments que d'applaudissements impromptus. Puis, Gilles Jacob prononce son discours comme il en réserve un à chaque personnalité du septième art ainsi invitée...le terme discours est d'ailleurs quelque peu incorrect celui-ci s'apparentant davantage à une déclaration d'amour à l'actrice. Catherine Deneuve écoute sagement esquissant de temps à autre un sourire, mi-amusée, mi-flattée ou peut-être simplement ailleurs, indifférente à des compliments maintes fois réitérés ou inquiète à la perspective d'être ainsi pour la énième fois observée, détaillée, scrutée et aléatoirement critiquée sur les outrages éventuels des ans qui l'ont pourtant épargnée. Gilles Jacob emporté par la passion révèle qu'il considère que les jurés avaient gaspillé le prix d'interprétation l'année où il ne l'avait pas remis à Catherine Deneuve pour" Le lieu du crime" de Téchiné. En guise de consolation mais surtout d'hommage du festival de Cannes, il remet donc une palme d'honneur d'interprétation à celle qu'il qualifie de "Katharine Hepburn à la française". La salle applaudit timidement. En guise de préambule elle précise qu'elle ne donnera pas de leçon, contrairement à l'intitulé de la rencontre "leçon d'actrice". Après les compliments maintes fois réitérés viennent donc les questions maintes fois réitérées: ses débuts, Françoise Dorléac, François Truffaut... A sa demande défilent quelques extraits de films dans lesquels elle n'a pas joué : "Une femme qui s'affiche" de Cukor, "Le vent de la nuit" de P.Garel, "To be or not to be" de Lubitsch...mais le vrai film n'est pas réellement sur l'écran. Quand la lumière s'éteint pour laisser place à un extrait, Catherine Deneuve, apparemment fébrile, demande à voix basse si elle peut fumer. Son micro la trahit. La salle tressaille. Un léger soubresaut d'imprévu. Dans le clair obscur alors que les images défilent sur l'écran, sa silhouette, cigarette à la main, rappelle furtivement celle des actrices des films noirs. La lumière se rallume. Elle cite Bergman, Kazan aussi beaucoup. Avec l'obscurité,l'imprévu s'est éclipsé. "

    Sandra.M

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