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Kristin Scott Thomas, maîtresse de cérémonies du Festival de Cannes 2010(2)

kristin.jpgJe vous l'annonçais dès hier soir sur "In the mood for Cannes" : c'est Kristin Scott Thomas qui présentera les cérémonies d'ouverture (le 12 mai) et de clôture (le 23 mai) du 63ème Festival de Cannes. Nul doute qu'elle apportera classe, élégance et intelligence à cet exercice périlleux. Elle succède ainsi à Edouard Baer, maître de cérémonie des éditions 2008 et 2009 et elle reprend une place qu'elle avait déjà occupée en 1999. Je peux d'ores et déjà vous annoncer qu'Inthemoodforcinema  sera (fort probablement) à ces deux cérémonies et je vous promets une immersion cannoise toute particulière cette année, je vous en dis prochainement plus. En attendant, je vous propose ci-dessous deux critiques de films avec Kristin Scott Thomas "Il y a longtemps que je t'aime", bouleversante peinture des âmes grises" signée Philippe Claudel (pour lequel elle a reçu le César de la meilleure actrice 2009 et le prix de la meilleure actrice européenne 2008) et "Partir" de Catherine Corsini, deux films dans lesquels elle est exceptionnelle et que je vous recommande. En fin d'article vous trouverez également une filmographie de Kristin Scott Thomas.

"Il y a longtemps que je t'aime" de Philippe Claudel: critique du film

65ac8f39ddfb68b4d2c7cd6960c52370.jpgHier matin avait lieu la projection presse d’ « Il y a  longtemps que je t’aime » de Philippe Claudel, à l‘UGC Normandie.

Le film s’ouvre sur le regard bleu et absent et glacial de Kristin Scott Thomas (Juliette), ce regard qui va nous happer dans les abysses de ses douleurs et ses secrets et ne plus nous lâcher jusqu’à la dernière seconde du film. Ses traits sont tirés, sa démarche maladroite, ses réactions sont brutales. Elle vient de sortir de prison après 15 ans d’enfermement.  15 années pendant lesquelles sa famille l’a rejetée. Sa jeune sœur, Léa (Elsa Zylberstein), vient la chercher pour l’héberger et l’accueillir chez elle auprès de son mari Luc (Serge Hazanavicius) et ses deux filles, adoptives (ce qui n’est évidemment pas anodin). L’une et l’autre vont alors reconstruire leur relation et reconstruire le passé, panser cette plaie à vif, ce gouffre béant. Juliette va devoir se faire « adopter ».

78c6f923d22bbf6d767494e0cca2be92.jpgA la manière d’un tableau qui l’on jugerait rapidement, s’arrêtant à notre premier regard, vue d’ensemble imparfaite et simpliste et finalement rassurante dans nos certitudes illusoires, c’est d’abord le mal être, la violence des réactions de Juliette qui nous apparaît, filmée en plongée, si fragile, brisée par la vie, l’absence de vie. Le cinéaste distille les informations retenant judicieusement notre attention par cette soif de comprendre, accroissant notre curiosité pour cette femme aux contours de moins en moins flous mais de plus en plus complexes. On apprend ensuite qu’elle a commis l’impardonnable : elle a tué son enfant. Elle devrait être détestable mais l’humanité avec laquelle elle est filmée, son égarement, son mutisme obstiné sur les circonstances du drame, la violence des réactions qu’elle provoque suscitent notre empathie puis notre sympathie.  « Crime et châtiment ». Dostoïevski. (Probablement le livre le plus cité au cinéma, non ? Ici, aussi.) Le tableau nous apparaît d’abord très noir. Et puis les nuances apparaissent peu à peu. Juliette « Raskolnikov » s’humanise. Nous voyons le monde à travers son regard : faussement compassionnel,  un monde qui aime enfermer dans des cases, un monde qui juge sans nuances. Un monde dont Philippe Claudel, peintre des âmes grises (Juliette est d’ailleurs presque toujours vêtue de gris) et des souffrances enfouies, nous dépeint la cruauté et la fragilité avec acuité.

123d0f153ac881bcd7bc96b0868d006a.jpgIl y a des films comme ça, rares, qui vous cueillent, vous embarquent, vous emprisonnent délicieusement dans leurs univers, douloureux et, puis, lumineux, dès la première seconde, pour ne plus vous lâcher.  C’est le cas d’ « Il y a longtemps que je t’aime », premier film en tant que réalisateur de l’auteur des « Ames grises » (Prix Renaudot 2003 adapté par Yves Angelo) et du « Rapport de Brodeck » qui a également signé le scénario.  La bienveillance de son regard sur ces âmes grises, blessées, insondables, parcourt tout le film. Tous ces personnages, libres en apparence, sont enfermés à leur manière : le grand-père muet à la suite de son accident cérébral est muré dans son silence, la mère de Juliette et Léa est enfermée dans son oubli après l’avoir été dans son aveuglement, le capitaine est enfermé dans sa solitude, Michel –Laurent Grévil- (un professeur qui enseigne dans la même faculté que Léa et qui va s’éprendre de Juliette) est enfermé dans ses livres, Léa est enfermée dans ce passé qu’on lui a volé, et Juliette est encore enfermée dans cette prison à laquelle on ne cesse de l’associer et la réduire. La caméra ne s’évade que très rarement des visages pour mieux les enfermer, les scruter, les sculpter aussi, les disséquer dans leurs frémissements, leurs fléchissements, leurs fragilités : leur humanité surtout. La ville de Nancy où a été tourné le film est quasiment invisible. Nous sommes enfermés. Enfermés pour voir. Pour distinguer les nuances, dans les visages et les regards. Comme cette jeune fille que Michel vient sans cesse voir au musée, enfermée dans son cadre, et qui ressemble à un amour déçu et dont il se venge ainsi parce qu’elle ne peut pas s’échapper. Nous ne pouvons nous enfuir guidés et hypnotisés par le regard captivant, empli de douleur et de détermination, de Juliette. Nous n’en avons pas envie.

Ne vous méprenez pas, ne soyez pas effrayés par le sujet. Si le tableau est sombre en apparence, ses couleurs sont multiples, à l’image de la vie : tour à tour cruel, très drôle aussi, l’ironie du désespoir peut-être, l’ironie de l’espoir aussi,  les deux parfois (scène du dîner), bouleversant aussi, ce film vous poursuit très longtemps après le générique à l’image de la rengaine qui lui sert de titre.  Il est parfois plus facile de chanter ou d’esquisser que de dire. « Il y a longtemps que ».  Tout juste peut-on regretter que les traits de la personnalité du personnage de Luc ne soient qu’esquissés. (néanmoins interprété avec beaucoup de justesse par Serge Hazanavicius). Mais à l’image du verdict improbable, cela importe finalement peu.

ef7396aca26c62ce0118fae3b1ff799a.jpgKristin Scott Thomas trouve là un personnage magnifique à la (dé)mesure de son talent, au prénom d'héroïne romantique qu'elle est ici finalement, aimant inconiditionnellement, violemment. A côté d’elle le jeu d’Elsa Zylberstein nous paraît manquer de nuances mais après tout la violence de la situation (le passé qui ressurgit brusquement) justifie celle de ses réactions.  Au contact l’une de l’autre elles vont reconstituer le fil de l’histoire, elles vont renaître, revivre, et illuminer la toile.

Jusqu’à cet instant paroxystique où le regard, enfin, n’est plus las mais là, où des larmes sublimes, vivantes, ostensibles, coulent sur la vitre,  de l’autre côté, inlassablement, et les libèrent. Un hymne à la vie. Bouleversant. De ces films dont on ressort avec l’envie de chanter, de croquer la vie (dans le sens alimentaire et dans le sens pictural du terme) et la musique du générique, de Jean-Louis Aubert, achève de nous conquérir. Irréversiblement.

"Partir" de Catherine Corsini: critique du film

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N'ayant été enthousiasmée ni par « La Nouvelle Eve » ni par le caricatural « Les Ambitieux », l'idée de « partir » me faisait redouter le pire...

 Ici, Suzanne (Kristin Scott Thomas) mène une vie bien (trop) tranquille avec son mari médecin (Yvan Attal) dans une belle maison, glaciale, comme ce dernier.  Après une dizaine d'années passées à élever ses enfants, elle a décidé de recommencer à travailler et de faire construire un cabinet de kinésithérapie attenant à la maison familiale. C'est Ivan (Sergi Lopez), un ouvrier espagnol employé au noir, qui vit de petits boulots et a fait de la prison, qui est chargé des travaux. Un accident va les rapprocher et bientôt une passion irrépressible. Plus rien d'autre ne comptant alors pour elle, Suzanne n'a alors plus qu'une idée en tête : partir. Oui, mais voilà : le mari va s'y opposer férocement. Et va alors commencer un odieux chantage et la descente aux Enfers...

Le mari, la femme, l'amant. L'épouse d'un bourgeois de province qui s'ennuie et qui s'éprend violemment d'un autre homme. Un synopsis de vaudeville classique voire caricatural que Catherine Corsini parvient à transcender grâce à la personnalité de ses protagonistes et des acteurs qui les incarnent, grâce à l'atmosphère pesante alors palpitante pour le spectateur, grâce à l'odieux chantage pécuniaire qui ajoute un élément supplémentaire et inédit à ce schéma classique.

Les acteurs et les personnages d'abord et évidemment au premier rang de ceux-ci : Kristin Scott Thomas qui de « 4 mariages et un enterrement » à « Il y a longtemps que je t'aime » en passant par « Le Patient Anglais » jongle avec les styles et les rôles avec un talent déconcertant. Et puis quel regard, tour à tour celui d'une enfant perdue,  celui désarçonné d'une femme séduite puis tombant amoureuse, celui lumineux de femme éperdument amoureuse, celui d'une femme dévorée par la passion et sa violence ravageuse, celui d'une épouse blessée, humiliée, mais déterminée, celui d'une femme aux frontières de la folie et au-delà. Celui d'une grande actrice aux multiples facettes. Face à elle, Sergi Lopez impose sa séduisante et rassurante  force. Reste Yvan Attal. Si l'acteur est ici plus que convaincant dans son rôle de mari obséquieux devenant l'odieux maître d'un ignoble chantage pécuniaire parce qu'il perd « sa » femme, sa possession, et sa parfaite image d'homme établi et respecté par la société, le film aurait probablement gagné en ambiguïté et en tension à ce qu'il soit plus nuancé et à ce qu'il ne soit pas détestable dès les premières minutes du film. Mais de cela, Yvan Attal, absolument parfait dans ce rôle qui ne l'est pas, n'en est nullement responsable.

Ces deux raisons qui s'égarent (l'une par la passion, l'autre parce qu'il perd sa possession et d'une certaine manière son statut), -Ivan étant finalement le plus raisonnable des trois-, vont inéluctablement aboutir au drame que l'on sait dès les premières minutes par le retentissement d'un coup de feu qui précède le flashback, bombe à retardement qui contribue à créer un climat de tension qui va crescendo tout au long du film. Le vaudeville frôle alors le suspense à la Hitchcock (frôle seulement, la réalisation, malgré quelques tentatives n'atteignant évidemment pas son degré de perfection et de « double sens ») avec Kristin Scott Thomas dans le rôle de la blonde hitchcockienne au tempérament de feu derrière une apparence glaciale. Le tout assaisonné de l'immoralité jubilatoire  de François Ozon, Emmanuelle Bernheim, scénariste de ce dernier ayant aussi contribué à l'écriture du scénario (avec Gaëlle Macé et Antoine Jacoud, et bien sûr Catherine Corsini).

Enfin, l'idée du chantage pécuniaire ajoute un élément matériel et original qui devient un moyen de contrôle et un obstacle judicieux à leur immatérielle et incontrôlable passion, et par conséquent la clef du drame.

La lumière du Midi, sublimée par la photographie d'Agnès Godard qui souligne aussi la beauté crue de certaines scènes,  ajoute au climat de folie ambiant et contribue à faire de ce  faux vaudeville un vrai, attrayant et tragique thriller, malgré ses quelques faiblesses scénaristiques.

Filmographie de Kristin Scott Thomas

Bel Ami  de Declan Donnellan, Ormerod Nick - Prochainement

The Woman in the Fifth  de Pawel Pawlikowski - Prochainement

 Contre toi  de Lola Doillon - Prochainement

Nowhere Boy  de Sam Taylor-Wood - 2010

Elle s'appelait Sarah de Gilles Paquet-Brenner - 2010

Confessions d'une accro du shopping  de P.J. Hogan - 2009

Partir  de Catherine Corsini - 2009

Un mariage de rêve  de Stephan Elliott - 2009

Largo Winch  de Jérôme Salle - 2008

Deux soeurs pour un roi  de Justin Chadwick - 2008

Seuls Two  de Eric Judor, Ramzy Bedia - 2008

A la croisée des mondes : la boussole d'or  de Chris Weitz - 2007

The Walker  de Paul Schrader - 2007

Ne le dis à personne de Guillaume Canet - 2006

Chromophobia  de Martha Fiennes - 2006

Secrets de famille de Niall Johnson - 2006

La Doublure de Francis Veber - 2006

Man to man de Régis Wargnier - 2005

Arsène Lupin  de Jean-Paul Salomé - 2004

Petites coupures  de Pascal Bonitzer - 2003

Absolutely Fabulous - Saison 5  2003

Gosford Park  de Robert Altman - 2002

La Maison sur l'océan  de Irwin Winkler - 2002

Play de Anthony Minghella - 2000

Il suffit d'une nuit  de Philip Haas - 2000

L'Ombre d'un soupçon  de Sydney Pollack - 1999

Amour, vengeance & trahison  de Malcolm Mowbray - 1999

L'Homme qui murmurait a l'oreille des chevaux  de Robert Redford - 1998

Souvenir  de Michael Shamberg (II)- 1998

Le Patient anglais  de Anthony Minghella - 1997

Amour et confusions  de Patrick Braoudé - 1997

Mission : Impossible  de Brian De Palma - 1996

Richard III  de Richard Loncraine - 1996

The Pompatus of love  de Richard Schenkman - 1996

Les Voyages de Gulliver (TV) de Charles Sturridge- 1996

Microcosmos, le peuple de l'herbe  de Claude Nuridsany, Marie Pérennou - 1996  Des anges et des insectes

Les Milles  de Sebastien Grall - 1995

Plaisir d'offrir  de François Morel - 1995

 Belle Epoque  de Gavin Millar - 1995

Le Confessionnal de Robert Lepage - 1995

En mai fais ce qu'il te plait  de Pierre Grange - 1995

Un Eté inoubliable  de Lucian Pintilie - 1994

Quatre mariages et un enterrement  de Mike Newell - 1994

Lunes de fiel de Roman Polanski - 1992

Mio Caro Dottor Gräsler  de Roberto Faenza - 1991

Aux yeux du monde  de Eric Rochant - 1990

Le Bal du gouverneur  de Marie-France Pisier - 1990

Force majeure  de Pierre Jolivet - 1989

Bille en tête  de Carlo Cotti - 1989

A Handful of Dust de Charles Sturridge - 1988

La Méridienne  de Jean-Francois Amiguet - 1988

Le Dixième homme (TV)  de Jack Gold- 1988  Under the cherry moon  de Prince - 1986

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